d’ASTORGA à SANTIAGO DE COMPOSTELA


Cette fois-ci c’est la fin. Je me mets en route pour l’ultime portion de mon Chemin vers Saint Jacques de Compostelle (en Espagnol Santiago de Compostela : Champs d’étoiles).

Je profite d’une arrivée plutôt matinale par le bus à Astorga pour visiter la ville. Sur les conseils d’un patron de café rencontré l’année précédente, je me régale d’une des spécialité locale : Cocido maragato, sorte de soupe à base de choux et un assortiment de plusieurs viandes.

De quoi me clouer à table et m’ôter l’envie de marcher ! Point du tout.

Je pars tranquillement pour 9 / 10 km une sorte de mise en jambe puisque ce sont 260 km sur 13 jours qui m’attendent.

 

Les étapes qui se succèdent ensuite ne sont pas très longues car le relief se dresse devant moi les monts de León, qui surgissent entre Astorga et Ponferrada. Depuis mille ans, le chemin file par des pentes raides vers le mont Irago (Puerto Irago), point culminant du chemin avec ses 1504 mètres d’altitude, et sa mythique Cruz de Ferro.

C’est une région un peu perdue où les petites villes ou villages sont peuplés de gens au grand cœur comme à Foncebadon. Restent d’épais murs en ruines, dont les pierres sèches reflètent un passé étroitement lié à la route de pèlerinage: vestiges d’hospice et d’abbaye dont se dégage une émouvante atmosphère de recueillement dans la solitude. On est pris d’un pincement au cœur en pensant aux rudes paysans qui habitaient ces lieux, et qui accueillaient (ou maltraitaient ?) les pèlerins de passage…

Les ruines désolées de ce village de montagne abritent une histoire que pourraient lui envier bien des villes plus importantes: au Xe siècle, le roi Ramiro II convoque un concile à Foncebadón. Un siècle plus tard, l’ermite Gaucelmo, l’un de ces saints moines qui ont « ouvert le Chemin », obtient du roi Alphonse VI l’autorisation d’y fonder un hôpital puis une église. Jusqu’à sa mort en 1123, Gaucelmo améliore le Chemin depuis Rabanal del Camino, avec l’aide de ses compagnons, ouvrant ainsi un tronçon du Camino entre Astorga et Ponferrada à travers les montagnes de León. Grâce à Gaucelmo et à ses successeurs, des millions de jacquets sont passés par Foncebadón, qui était l’une des étapes les plus appréciées du Camino, juste avant la montée au Puerto Irago.

 

Grâce aux marcheurs qui reprennent de plus en plus nombreux la vieille route du Camino francés, le village semble se ranimer peu à peu : une nouvelle taverne a été ouverte en 2001, et l’ancienne église a repris du service depuis quelques années en se transformant en refuge… Comme on se sent bien ici ! Il faut avoir goûté le calme profond de Foncebadón avant de découvrir, tout près, l’un des lieux les plus emblématiques du Camino : la Cruz de Ferro, croix de fer plantée sur sa montagne de cailloux…

 

En descendant, j’arrive à Ponferrada. Le château des templiers est une construction magnifique. Il est occupé par la bibliothèque des templiers et centre de recherche et d'études historiques de Ponferrada, qui contient près de 1 400 ouvrages, dont plusieurs fac-similés d'œuvres de Léonard de Vinci. Ce qui n'était à l'origine qu'une ville fortifiée devint ensuite une citadelle romaine.

Au début du XIIe siècle, les templiers prirent possession de la forteresse, la renforcèrent et l'agrandirent afin d'en faire un palais habitable et servant de protection aux pèlerins qui allaient à Saint-Jacques-de-Compostelle. L'édifice est de plan carré irrégulier. On y accède par un pont-levis surplombant un fossé. Plus avant, se trouvent deux grosses tours dont les créneaux sont réunis par un arc. Ses douze tours originales reproduisaient la forme des constellations.

 

Deux jours plus tard, lorsque l’on est à O Cebreiro, la vue est magnifique et laisse présager de la descente. Par ailleurs, on est en Galice, région la plus à l’ouest de l’Espagne qui marquera aussi la fin du périple. Certains choisissent de prendre un bus pour éviter la descente qui met souvent les articulations à rude épreuve. Ils éviteront ainsi 2 jours de marche. Moi je décide de marcher et j’arrive à Sarria.

 

Ces fameux 100 kilomètres, la distance minimum exigée pour pouvoir obtenir la Compostela, le « diplôme du pèlerin ». Il me semble que l'important c'est de pouvoir se dire « je l'ai fait » et non pas la Compostela, mais à chacun son point de vue. En marchant, je croise ce genre de randonneur ou pèlerin … je suis un peu dégoûtée ! ils ont l’air si frais, si légers avec leur petit sac à la journée. A ce moment-là, je me remémore pourquoi je me suis mise en route… et je suis fière de moi.

Plus que 4 ou 5 jours de marche, j’en ai le vertige en feuilletant mon carnet de pèlerin. Tous ces tampons, les différentes haltes, les échanges si chaleureux et les petites galères aussi !

 

La météo est de mon côté depuis que je suis partie le 22 septembre. Il fait un temps idéal pour marcher : sec et pas trop chaud lorsque j’arrive à Portomarin où je vais passer la nuit.

L'ancien village a été englouti par les eaux du barrage. Seule l'église a été démontée pierre par pierre et transportée sur les hauteurs avec les nouvelles habitations. On peut voir les numéros sur chaque pierres… il y a quelque chose qui me dérange dans cette ville mais je ne sais pas dire quoi. En tous cas, elle a un cachet tout à fait étonnant.

 

Le chemin est résolument orienté vers l’océan, le temps change. Le matin la brume est omniprésente, on peut distinguer l’odeur des embruns lorsque l’on est pas sous le charme des senteurs d’Eucalyptus.

Ces forêts brumeuses ont un air fantomatique.

 

Et voilà, je me suis portée la poisse puisqu’il se met à pleuvoir… je vais pouvoir tester l’étanchéité de mon matériel ! Hélas au bout de 3 heures sous une pluie battante rien ne résiste. La seule solution viable est le bon vieux sac plastique à condition qui soit neuf et pas troué.

Je m’arrête à Lavacolla pour me sécher et tenter de me réchauffer en buvant une boisson chaude. Je me dis que je vais m’arrêter là pour la nuit. Mais une allemande m’encourage et nous repartons ensemble.

Erreur ! La pluie redouble et nous arrivons à Santiago à tordre (littéralement). De plus, nous ne savons pas où dormir puisque nous n’avons rien réservé. Nous restons solidaires et finissons par trouver une petite pension tout près de la cathédrale.

Mes affaires et mon sac à dos mettront 2 jours entiers à sécher.

 

Je suis zen, totalement épanouie, indifférente à mon look. Je me balade en short et sandales avec une sorte de petit manteau en plastique acheté dans un magasin de souvenirs. J’ai réussi... j’ai parcouru 1 575 km sur 5 ans.

 

Nous partons à la recherche du bureau où obtenir la Compostela « le diplôme du pèlerin ».

 

L’aventure est terminée… pour cette fois !