FRANCOIS BAYROU L’ETERNEL REVENANT DE LA CLASSE POLITIQUE
Vingt ans après…
En effet, cela faisait deux décennies que François Bayrou n’avait plus été ministre.
Le voilà qui redécouvre les palais de la République avec en plus la fonction de Ministre d’Etat, Garde des sceaux.
Lui qui veut redorer le blason d’un milieu terni par les affaires en voulant faire adopter une loi sur la moralisation de la vie politique, le voici en position d’arroseur arrosé : de forts soupçons d’emplois fictifs concernant le MODEM ont été révélés dès sa nomination. Hasard ou coïncidence ?
A peine revenu aux « affaires », il fait déjà le « buzz ». En voulant intervenir auprès d’un journaliste pour se plaindre du traitement qui lui était réservé, François Bayrou s’est pris les pieds dans le tapis : une confusion entre le citoyen François et le Ministre Bayrou. Une attitude qui rappelle les codes anciens du personnel politique mais qui ne sied plus aux Français et assimile ainsi notre homme à un « dinosaure » en matière de pratique politique…
D’ailleurs, pourquoi est-il revenu, lui qui se targuait encore récemment de se consacrer « exclusivement » à sa bonne ville de Pau ? surtout après l’échec de son ami Alain Juppé à la primaire de la Droite ainsi que son renoncement à se présenter lui-même à la présidentielle, on pensait alors François Bayrou en retrait de la vie politique nationale.
C’était bien mal connaitre ce Béarnais de 66 ans qui semble bien confirmer l’adage suivant « on n’est jamais mort en politique ».
Si son parcours politique a pu s’avérer sinueux, il n’en demeure pas moins qu’il possède une évidente qualité : la persévérance ….
Lui qui avait failli réussir son pari d’accéder à la magistrature suprême en 2007 a su flairer « le gros poisson » en la personne d’Emmanuel Macron, chantre du « ni gauche ni droite » cher au maire de Pau. En se ralliant à lui, il a pu se redonner une seconde jeunesse et tenter de sortir son petit mouvement le «MODEM» de la marginalité….
La vie politique de Bayrou est faite d’une succession de rencontres : Nourri au biberon de la Démocratie- Chrétienne, on peut le qualifier de fils politique de Jean Lecanuet. Ce dernier fonda le Centre Démocrate qui se voulait déjà au centre de la vie politique française et qui réussit à mettre en ballotage le général de Gaulle en 1965.
Plus tard, le maire de Rouen, rallié à la majorité présidentielle de 1974, créera le Centre des Démocrates Sociaux, dont François Bayrou prendra la présidence dans les années 90. Impressionné par Giscard dont il deviendra un fidèle lieutenant, Il sera probablement réceptif au discours de l’ancien président à Verdun sur le Doubs « Rassembler deux français sur trois » au sein d’une même majorité présidentielle…
Ministre de l’Education entre 1993 et 1997 (dans les gouvernements Balladur puis Juppé), il déjà des velléités d’accéder au pouvoir, il croise la route de Nicolas Sarkozy, son futur meilleur ennemi sous le gouvernement Balladur, l’origine de leur brouille remonte à 1999, lors des européennes de 1999. Une indéniable lutte d’ego dans un premier temps et la sempiternelle guerre RPR-UDF peuvent expliquer cette « guérilla » fratricide.
En semi-opposition durant le deuxième quinquennat Chirac, François Bayrou va penser être le « recours » à cette vaste machine électorale que constitue l’UMP (alliant RPR et UDF) dont il n’adhère pas. Il perd un grand nombre de ses compagnons de route qui eux rejoigne la Formation nouvelle et se campe alors dans la posture du « représentant du Centre » jusqu’à la campagne électorale de 2007 où il réussit une percée spectaculaire…totalisant 18,5% des suffrages exprimés mais il n’obtient que la troisième place derrière Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal.
Créant alors le MODEM qui se proclame au Centre de la vie politique, (tiens, tiens) et tendant à se démarquer du sempiternel clivage droite-gauche, le futur maire de Pau ne prend pas son envol et entre dans une opposition frontale avec le Président de la République, perpétuant ainsi la brouille entamée dix ans plus tôt. D’autres de ses anciens lieutenants le quitte et certains esprits ironiques annoncent alors que le futur congrès du Modem se tiendra dans une cabine téléphonique.
La ligne politique est de moins en moins claire, certains élus MODEM sont alliés lors des municipales avec la majorité, d’autres avec l’opposition. Le coup de grâce pour François Bayrou sera son ralliement à François Hollande lors de la présidentielle de 2012. Il n’y aura aucun renvoi d’ascenseur, le nouveau président de la République se rappellera probablement de cette boutade de François Mitterrand : « Le Centre n’est ni à gauche ni. à gauche ». Il perd même son siège de Député qu’il tenait depuis 1986.
Après une indéniable traversée du désert, François Bayrou retrouve des couleurs lors des municipales de 2014 où il triomphe enfin à la mairie de Pau mais grâce au soutien de la Droite Juppéiste.
Requinqué, le président du MODEM se reprend à rêver et déclare qu’il soutiendra Alain Juppé si celui-ci est candidat. On connaît la suite, la boucle est presque bouclée, il désapprouve l’évident quadrature du cercle opérée par François Fillon, il ne se représentera pas lui-même pour la 4 -ème fois mais trouve un nouvel allié en la personne d’Emmanuel MACRON.
Il est évident que son soutien aura permis au futur chef de l’Etat de « passer » le premier tour puis de pouvoir s’imposer au second. Une ère nouvelle va s’éclore pour l’ancien Ministre de l’Education, qui prône dans les Médias que « la moralisation de la vie politique » est un des premiers chantiers de la présidence Macron.
Sa nomination au poste de Garde des Sceaux constituera cependant une surprise car elle ne constitue pas forcément un gage de « renouvellement politique » et comme nous l’avons mentionné plus haut, un piège va se refermer sur le Béarnais, qui, empêtré dans les affaires d’emplois fictifs du Modem qui ne sera plus crédible alors pour porter sur les fonts baptismaux une réforme primordiale…
Le vieil animal politique ainsi que son carré de fidèle (de Sarnez, Goulard) viennent donc de quitter le navire gouvernemental après une courte croisière.
La fin d’une époque où le temps d’un répit ? Avec François Bayrou, l’homme de pouvoir qui n’aimait pas l’exercer, tout est à envisager…….