TRIBUN OU GRAND GUEULE ?

 

Jean-Luc Mélenchon est infatigable : Il va avoir 66 ans et vient d’être élu Député des Bouches du Rhône en déboulonnant le cacique socialiste Patrick Menucci.

On l’avait cru groggy après son élimination au premier tour de la présidentielle, malgré une campagne vigoureuse et imaginative qu’il croyait gagnée d’avance. C’était sous-estimer cet éternel trublion

Pourtant, à peine élu sur les bancs du palais-bourbon, il a retrouvé ses fondamentaux : l’invective, la théorie du « rentre-dedans » notamment face au novice Cédric Villani, qu’il traite d’emblée de « matheux » ne connaissant rien de la « vraie vie » puis en fustigeant les us et coutumes de l’honorable institution.

31 ans plus tôt, en 1986, à peine élu plus jeune sénateur de France à 35 ans, il avait fustigé également une assemblée truffée, selon lui de vieux barbons et de notables poussifs. Un autre jeunot de 37 ans fut également élu : Gérard Larcher, devenu depuis Président du Sénat !

L’adepte de la Sixième République est un révolté professionnel, se promettant de « foutre en l’air » ce système qui selon lui à trop vécu. Après cinq ans de fronde anti-Hollande le voilà à l’assaut de la citadelle Macron qu’il compte bien dézinguer. Son charisme naturel, le sens de la formule et les éclats médiatiques peuvent l’aider dans sa quête, à défaut de le faire au niveau législatif car il sait bien que ses 17 députés (bien plus nuancés que lui, Ndlr) ne suffiront pas de réussir à mener à bien son entreprise.

Mais d’où lui vient cette colère permanente ?

Certains diront de son passé Trotskyste hérité de sa mère, adhérente à l’OCI lors de son passage à l’université

Ayant barbotté dans le bouillon du mois de Mai 1968, le lycéen Mélenchon participe au cœur son Jura d’Adoption (il a fait ses premiers pas à Tanger, puis après le divorce de ses parents, il atterrit avec sa mère en Normandie puis à Lons-le-Saulnier), il se peut que cette forme de militantisme l’ait boosté dans ces coups de gueule…

Ses études terminées, il tâte vaguement du journalisme et de l’enseignement mais au milieu des années Soixante-dix, il rencontre lors d’une fête socialiste, celui qui deviendra son mentor en politique : Claude Germon, maire de Massy et futur député.

Le déraciné retrouve un point d’ancrage dans cette ville-champignon du Nord-Essonne, d’abord Maire-Adjoint, aux côtés notamment de Marie-Noëlle Lienemann, futur député et ministre.

Ayant rejoint le PS en 1976, il est très rapidement apparenté à l’aile gauche du parti et le restera jusqu’en 2008, date de sa rupture avec le parti.

Elu conseiller général de Massy-Ouest lors de la création du canton en 1985, son ascension va alors être fulgurante. Elu Sénateur de l’Essonne en 1986, il accroit de fait sa notoriété. Ses réussites électorales sont contrariées par quelques déroutes : en 1992, il est battu par Vincent Delahaye, futur maire de Massy. Mais il prendra sa revanche en 1998 avec en prime la victoire écrasante de la Gauche aux cantonales dans l’Essonne, récoltant ainsi un poste de Vice-Président.

Nommé Ministre délégué en 2000, il tente quelques goûts de gueule mais rentre rapidement dans le rang…

Il cultive son image d’apparatchik, franc-maçon, laicard militant, futur admirateur de quelques « démocrates » d’amérique latine…

La première décennie du troisième Millénaire sera capitale pour lui : il critique de plus en plus la stratégie du Ps et lors de la déroute de celui-ci en 2002, il appelle clairement barrer la route à Jean-Marie Le Pen.

En 2008, il claque la porte du PS et fonde le Parti de Gauche, entraînant avec lui quelques cadres de l’aile gauche du PS. Un acte risqué mais courageux, ce que n’ont pas fait les frondeurs durant le quinquennat Hollande.  Il en profite pour s’allier avec le Parti Communiste, ce qui deviendra le Front de Gauche par la suite. Mais ses rapports avec Pierre Laurent s’avèreront assez vite conflictuels, probablement en raison d’un leadership affirmé de l’ancien socialiste…

En 2012, il se présente à la présidentielle et obtient 10 % des suffrages exprimés. Il fait durer le suspense quant à son désistement pour François Hollande. Ce qu’il finit par faire mais plus par anti-sarkozysme affirmé.

D’ailleurs ce soutien timide demeurera un boulet pour l’ancien président de la République qui trouvera en Mélenchon un de ses plus virulents détracteurs. Pas un jour sans un nom d’oiseau à son encontre.

Durant ce quinquennat Hollande, la stratégie de Jean-Luc Mélenchon sera de constituer un nouveau pôle de gauche radicale, mais qui selon lui sera l’incarnation de la vraie gauche, pas celle social-libérale incarnée par le pouvoir en place….

A nouveau candidat en 2017, il mènera une habile campagne, plutôt originale en matière de communication (ah, l’hologramme…), surfant de plus sur l’immense vague de mécontentement concernant l’équipe sortante.

L’objectif affiché pour Mélenchon : dans un premier temps, dézinguer le PS, puis rattraper une droite empêtrée dans le scandale Fillon afin de pouvoir affronter son éternelle rivale : Marine Le Pen.

Sûr de son succès, il échoue cependant une fois de plus à accéder au second tour. Vraiment atteint par cette contre-performance, on l’aura cru prompt à quitter la vie politique. Mais le vieux politicien a rapidement repris des couleurs avec dans sa ligne de mire, le Wonder Boy, Emmanuel Macron.

Cette fois, un combat de David contre Goliath ? ….A vous de deviner lequel des deux il espère incarner….