LE CHEMIN DE PAPA
C’est clair, la présence notable du Front National au Palais-Bourbon n’aura été qu’une « parenthèse enchantée » pour le parti de Jean-Marie Le Pen.
En cette année 1988, après la réélection sans appel de François Mitterrand face à son Premier Ministre de cohabitation Jacques Chirac et la dissolution de l’Assemblée nationale, entraînant également le retour du scrutin majoritaire uninominal à deux tours ne permet pas aux sortants Frontistes de sauver leurs sièges, ce type de scrutin ne les favorisant guère….
Pourtant, une seule députée Frontiste sauve son siège en la personne de Yann Piat, « filleule » de Jean-Marie Le Pen. Réélue dans le Var, elle se brouillera cependant rapidement avec son « parrain » Jean Marie et rejoindra les rangs de la droite traditionnelle. Elle connaitra un destin tragique en étant assassinée.
Mais l’absence de représentation parlementaire n’empêche pas le « Menhir » de faire parler de lui via les médias, bien avant les réseaux sociaux, la télévision reste la vitrine idéale pour avancer ses pions sur l’échiquier politique….
La réélection de François Mitterrand ne lui trace pas pour autant un boulevard dans le monde politique. Le parti communiste refusant d’être associée à la majorité présidentielle, le gouvernement dirigé par le meilleur ennemi du Président, Michel Rocard ne possède alors qu’une majorité relative….
Le premier ministre tente alors l’ouverture vers les partis modérés, notamment vers l’UDF en captant vers lui des anciens ministres de Giscard : Jean Pierre Soisson, Michel Durafour ou encore Olivier Stirn mais cela ne suffit pas à éviter le risque permanent d’un « renversement du gouvernement » comme sous la Quatrième République……
Pendant ce temps, l’ex-député Jean-Marie Le Pen se fait toujours présent sur les radios et télévisions même s’il déplore que l’on ne l’invite pas assez par rapport aux autres leaders nationaux.
L’an passé, il a provoqué un tollé en annonçant que les « chambres à gaz » n’étaient qu’un « point de détail » dans l’histoire de la seconde guerre mondiale. En 1988, il déclame son fameux calembour de « Durafour crématoire » qui lui attire de nouveaux les foudres de ses opposants et surtout lui ouvre les portes des tribunaux avec des condamnations à la clé.
Mais le « Menhir » n’a rien perdu de sa fibre provocatrice née lors de sa vie étudiante et continue à tracer de façon durable son sillon dans le paysage politique français. Il dévoile les grandes lignes de son programme politique qui rappellent étrangement celles des partis politiques populistes d’avant- -guerre : l’antiparlementarisme, donner la parole au peuple par le biais de referendum d’initiative populaire sur des sujets sensibles : comme l’immigration, source de bon nombre de maux de la société du moment, selon lui ou encore la poussée endémique de l’insécurité provoquée d’une part par les populations venues d’ailleurs et surtout par le laxisme des partis au pouvoir, on voit déjà poindre le mythe de « la bande des quatre » (RPR, UDF, PC, PS) qui mènent la France vers une faillite économique et surtout morale.
Etudiante à Assas, la future avocate Marine Le Pen fricote avec le Cercle Etudiant, proche du FN et compte également beaucoup d’amis au GUD (Groupe Union Défense), groupuscule qui pratique aussi bien la violence verbale que physique….
Devenue avocate en 1992, Marion Anne Perrine décide de franchir le Rubicon politique en se présentant dans la 16 -ème circonscription de Paris (17 -ème arrdt) dont le sortant est Bernard Pons, Chiraquien pur jus, ancien Ministre des TOM DOM et ex Député du Lot puis de l’Essonne (1978-81).
Son baptême du feu même s’il se concrétise par une défaite dès le premier tour (remportée par le sortant) lui permet cependant de rencontrer un score prometteur : plus de 11 % des suffrages….
Mais ce n’est pas dans la Capitale que la fille du « Chef » va faire carrière. Il va falloir trouver un « fief », un endroit dans lequel on peut s’enraciner de façon durable….
Cela sera d’ailleurs la stratégie du Front National : s’implanter dans des endroits susceptibles de lui apporter des suffrages conséquents et d’être enfin élu malgré un suffrage uninominal à deux tours qui lui est défavorable contrairement à la proportionnelles et surtout « le plafond de verre » (la connivence de la « bande des quatre » pour lui barrer la route du succès).
Mais quelles sont ces endroits « favorables » ?
On en trouve aux quatre coins de l’Hexagone mais particulièrement dans les anciens bassins industriels qui ont périclité au début des années 70-80 provoquant un chômage de masse et l’émergence de poche de pauvreté de façon durable. C’est le cas du Nord-Pas de Calais, de la Picardie, de la Lorraine ou encore de la région PACA dans le Sud.
Terres traditionnellement de gauche, rappelons que le Nord et les Bouches du Rhône par exemple abritent les deux plus grandes fédérations socialistes de France mais les récentes désillusions d’un électorat acquis depuis toujours aux valeurs de gauche va progressivement le voir glisser soit vers l’abstention soit vers un Front National porteur de solutions radicales (face à une émigration élevée dans les zones citées).
Si Papa choisit le «Sud » et notamment la région Marseillaise, la fille jette son dévolu le Pas de Calais. En 1998, elle figure sur la liste de Carl Lang, futur ex-grand espoir du FN qui entrera par la suite en dissidence pour mieux disparaître du champ poltique……