A PARTIR DE CETTE LIMITE VOTRE TICKET EST TOUJOURS VALABLE (EDITO DU 5 FEVRIER)

Ainsi nos amis Britanniques ont divorcé de l’Europe après 47 ans d’une union souvent tumultueuse. Enfin, presque divorcé car il reste le plus dur à faire : réussir complètement les modalités qui devraient finaliser cette séparation avec le désormais ex-partenaire et cela ne risque pas d’être une partie de plaisir…

Après trois ans et demi d’un interminable feuilleton qui aura connu plein de rebondissements  affolant au passage les chancelleries européennes et surtout finissant par exaspérer les citoyens de la « perfide Albion », qu’ils soient pour le maintien ou le retrait de l’UE  et qui auront entendu parler du Brexit matin, midi et soir subissant l’impuissance d’une classe politique à sortir de ce qui devenait une véritable quadrature du cercle….ont aperçu le bout du tunnel sous la Manche qui s’est soudain éclairci….

Au premier jour fut le commencement : celui d’un pari osé d’un Premier Ministre, David Cameron, digne héritier de la Dame de Fer, Margaret Thatcher qui voulait comme elle bretter le fer avec ces messieurs de Bruxelles et qui n’obtenant pas assez vite ce qu’il réclamait lança l’idée d’un referendum pour la sortie du Royaume-Uni, jusque comme ça pour voir……Tralala….

On connait la suite : à la surprise générale, le « Yes » à la sortie de l’Union Européenne a été voté par 52 % des votants. Les Brexiters, sont issus en majorité des régions défavorisées et ont « damé » le pion aux Remainers, provenant quant à eux du Grand Londres prospère ou de l’Ecosse aux velléités indépendantistes bien connues….

L’Europe a donc vécu ce résultat comme une véritable onde de choc : pensez donc la troisième économie européenne décidant de claquer la porte de la vénérable institution Bruxelloise…

La France, la première s’est émue de ce résultat (bien qu’elle fût soixante ans plus tôt farouchement opposée à l’adhésion British proposée dès 1961), voyant comme un signal inquiétant lancé à une Europe dont la fragilité politique et économique est déjà bien entamée…

Parmi les Brexiters en chef, un certain Boris Johnson, alias Bojo, ancien journaliste à…Bruxelles, naguère maire de Londres et surtout personnage excentrique voire bouffonesque pour certains et qui s’en est donné à cœur joie pour voir dans ce résultat le « retour à la grandeur britannique, sortie des chaines européennes ». Mais les semaines qui ont suivi ont également plongé la Grande-Bretagne dans l’amorce d’une grande incertitude économique : fuite des entreprises, dévaluation de la Livre, inquiétude des marchés financiers, colère des nations Irlandaise et Ecossaise, etc….

La valeureuse Térésa May devenue Premier Ministre, d’abord Remainer convaincue s’est transformée en Brexiter par la force des choses et aura tenté en vain de trouver plusieurs accords de sortie lors d’exténuants marathons entre Londres et Bruxelles, sermonnés par de rudes négociateurs et retoqués par un Parlement Britannique hostile à trouver un quelconque compromis….

Elle a fini par jeter l’éponge, certains observateurs ont cru entendre sonner le glas de la sécession britannique, prompte à regagner la maison Europe mais son successeur proclamé, le toujours fantasque Boris Johnson en a décidé autrement, se voulant l’artisan d’une sortie coûte que coûte même avec un « no deal ».

Un grand nombre d’observateurs ne donnait pas cher de la durée du séjour de Bojo au 10, Downing Street tant l’homme est imprévisible , mais le rusé Boris a tenté un coup de poker : dissoudre le parlement, espérant dégager alors une majorité susceptible de mener à bien cette bien épineuse entreprise… et son audace lui a donné raison : une large majorité conservatrice claire nette et surtout acquise est sortie des urnes, balayant au passage les ambitions du bien pale opposant Travailliste Jeremy Corbyn….

Ce succès électoral incontestable a changé la donne, donnant une légitimité au Premier ministre pour mener à bien son entreprise de sortie de l’Union cette fois-ci avec l’aval du Parlement, ce qui a été fait le 1 er Février.

Le retrait des drapeaux britanniques à Bruxelles et le départ des députés de Strasbourg a donc marqué les esprits, échauffé certains avec la décision d’interdire les zones de pêche de Guernesey aux bateaux français, mesure retirée depuis….

Mais comme nous l’avons dit, tout reste à faire dans la négociation des accords économiques en cours. A la barre pour mener la bataille, le « montagnard » Michel Barnier dont les talents de négociateur habile et intraitable ne sont plus à démontrer face à un homme proche de Bojo, David Frost….

Parions que les deux hommes ne se feront pas de cadeau, chacun souhaitant tirer le meilleur parti possible de ces discussions. Les déclarations fracassantes de Boris Johnson, souhaitant faire de son pays, un « nouveau Singapour sur Tamise » avec l’œil bienveillant d’un Donald Trump ne doivent pas faire oublier la forte dépendance des Britanniques envers l’Europe (près de 50 % de ses exportations, contre 7% dans le sens inverse) et que le risque d’un « no deal » en cas d’enlisement ne favoriserait personne et surtout pas le Royaume-Uni qui pourrait alors voire poindre un risque de démantèlement (notamment l’Europhile Ecosse ou l’Irlande du Nord) qui serait très préjudiciable pour le pays de sa très gracieuse Majesté….

La meilleure issue à ces âpres discussions serait bien sûr un accord à l’amiable entre les deux parties permettant au Royaume-Uni de continuer à profiter à l’extérieur des avantages du marché unique mais le calendrier va s’avérer chargé et surtout court dans le temps en sachant que Johnson refusera de le prolonger au-delà de la fin de l’année comme cela lui a été proposé…

Pour conclure, un peu d’humour que ne renierait pas Bojo, conscient de sa bonne étoile : le Royaume-Uni pourrait être noyé dans un épais brouillard d’incertitude : le Continent européen serait alors être coupé du Monde……

LE FILS DU CHIFFONNIER (Edito du 11 Février)

 

Issur Danielovitch Demsky est mort à 103 ans. Belle longévité pour ce fils d’un chiffonnier venu de Russie qui avait rejoint alors la terre promise : les Etats-Unis où notre défunt naquit en 1916, quelque part dans l’Etat de New York.  Au cours de cette longue et exceptionnelle existence, il deviendra une des plus grandes stars du cinéma Hollywoodien sous le nom de Kirk Douglas…

On avait fini par le croire immortel celui qui connut une gloire internationale dont l’apogée se situa dans les années cinquante et soixante, collectionnant les classiques et autres succès publics et critiques, tournant avec les plus grands : Kubrick, Hawks, Kazan, Huston, Minelli, Walsh ou encore Wyler….

Ce séducteur tint dans ses bras les plus belles actrices d’Outre-Atlantique : Lauren Bacall, Ava Gardner, Kim Novak ou encore Lana Turner et se frotta à d’autres monstres sacrés (Burt Lancaster, Anthony Quinn, Tony Curtis, James Mason) mais pourtant il n’obtint jamais d’Oscar, sinon celui pour l’ensemble de sa carrière (que l’on décerne généralement pour s’excuser de ne pas l’avoir fait auparavant  ou que le récipiendaire ne va pas tarder à nous quitter). L’honneur familial a été sauf car son illustre fils Michael en a obtenu deux : un comme producteur, un autre comme acteur….

Mais cette absence de trophée sur sa cheminée ne l’a pas empêché de devenir une star planétaire reconnaissable avec sa fossette fétiche et d’avoir des convictions personnelles qui ne plaisaient pas forcément au « politiquement correct » qui plane sur ce type de microcosme que ce sont le cinéma et le milieu des arts en général….

Kirk Douglas enchaîna les succès publics et critiques, n’hésitant à prendre des risques comme celui d’engager Donald Trumbo, scénariste « blacklisté » lors du Maccarthysme et paradoxalement de jouer sous la direction d’un Elia Kazan, jugé par ses pairs comme étant une « balance » lors de cette période sombre ou encore d’apparaître dans les « Sentiers de la Gloire » jugé antimilitariste et portant atteinte à l’honneur de l’armée et qui fut interdit notamment en France durant 18 ans….

Être une star ne signifie pas être uniquement une icône, sorte d’usine à fantasmes et d’admiration sans bornes, forcément inaccessible et vivant dans une tour d’ivoire cossue, cela peut être aussi la possibilité, du fait de sa notoriété, de pouvoir mener des combats qu’ils soient humanitaires, écologiques ou de tout autre ordre d’ailleurs….

On emploie ce mot « Star » à toutes sauces (Télévision, Mode, Cinéma, Littérature, Sports) tentant de trouver la définition la plus juste comme tenta de le faire Jacques Séguéla, « star » de la publicité à l’endroit de Kirk Douglas invité comme lui sur le plateau de la mythique émission « Apostrophes » en 1989 où il présentait son autobiographie : « le Fils du Chiffonnier » . Ce dernier finit par l’interrompre, le rembarrant gentiment dans un Français impeccable avec un percutant « qui êtes-vous, Monsieur, pour décider qui est une star ou qui ne l’est pas ? Le sourire goguenard de « Spartacus » laissa notre publicitaire tout penaud……

Être une star signifie en fait que l’on ne doit jamais oublier d’où l’on vient et que votre carrière ne peut pas rester sempiternellement au firmament, ce fut probablement la ligne de conduite de Monsieur Douglas qui connut un déclin notable de sa carrière dans les années 70-80 mais qui demeura cependant un spectateur engagé, fondant au passage une fondation pour les enfants défavorisés. Affaibli par la maladie, il n’hésita pas à réveiller les consciences du risque de faire élire un Donald Trump, initiative vaine mais dont l’intention ne manquait pas de panache…

Ainsi, c’est éteint un des derniers géants d’Hollywood, celui qui savait jouer tous les rôles : du matelot de « 20 mille lieues sous les mers », du cow-boy de « Règlement de comptes à OK Corral » ou encore le journaliste déchu du « Gouffre aux chimères » ou le physicien patriote des « Héros de Télémark » et qui composa un héros tantôt sympathique tantôt nocif, n’hésitant jamais à prendre des risques pour amener son jeu d’acteur à la perfection, n’est ce pas ça la marque de fabrique des stars ?

LA LUNE DANS LE CANIVEAU (Edito du 17 février)

Il a donc décidé de jeter l’éponge afin de ne pas continuer à être éclaboussé par un scandale qui ne cessait de polluer la sphère médiatique et qui lui aurait finalement pourri la vie. A 42 ans, le fidèle lieutenant d’Emmanuel Macron, candidat à la Mairie de Paris qu’il comptait bien ravir à la sortante Anne Hidalgo vit probablement un moment de grande solitude.

Un abandon rapide provoqué la diffusion sur la Toile d’une vidéo trash dont il était l’acteur principal mais qui ressemble à une sorte d’Arlésienne : tout le monde en parle mais pratiquement personne ne l’a vue mais cela a suffi pour faire de lui l’homme par qui le scandale arrive surtout  le même s’est érigé en garant des valeurs si précieuses de la famille et de la fidélité inculquées lors d’une éducation scolaire dispensés par les Pères Jésuites….

La classe politique dans sa grande majorité a salué la décision du candidat de se retirer, tout en déplorant une « Américanisation » de la vie politique française, faisant fi de la vie privée et du droit de mener la mener à sa guise.

Du côté du Front Parisien, tout le monde y est allé de son couplet de compassion et d’indignation, à commencer par le rebelle Cédric Villani qui a apporté son soutien dans l’épreuve à son ex-compagnon de route tout en jubilant probablement de pouvoir tirer profit des déboires du «préféré » du locataire de l’Elysée et Rachida Dati, l’Outsider qui monte qui monte et qui est de tout cœur avec son compatriote bourguignon, en effet ces deux « parisiens d’adoption » sont tous les deux nés dans la même ville : Saint Rémy, dans la banlieue de Chalon sur Saône !.

Mais le parcours de ce fils de notaire est bien différent de celui de la fille d’émigrés marocains même s’ils sont devenus tous les deux des Rastignac à l’assaut de la Capitale, ont eu leurs mentors respectifs (Strauss-Kahn pour le premier, pourquoi riez-vous ? Chalandon pour la seconde) et sont tous les deux devenus ministres à peine quadragénaires…

Benjamin Griveaux a donc fait ses premières armes sur sa terre natale de Saône et Loire sous la bannière socialiste, se faisant élire au passage conseiller municipal de Chalon sur Saône puis à siégé au Conseil général alors dirigée par Arnaud Montebourg (mais qui n’était pas vraiment son ami). Mais un beau matin de 2015, sa route croise celle d’Emmanuel Macron, de huit jours son cadet et qu’il ne va plus quitter, se lançant dans cette aventure folle qu’était la création d’un mouvement de Marcheurs qui rendit sceptique plus d’un jusqu’à l’élection de 2017 qui a propulsé son champion à l’Elysée….

Mais le brillant jeune homme, porte-parole du nouveau monde a rapidement connu des déboires : d’abord comme porte-parole du gouvernement où il était très contesté, s’attirant les foudres de ses adversaires mais également de certains membres de la majorité qui le juge « arrogant » voire méprisant.

Alors, il quitte le gouvernement qui connait des heures difficiles notamment avec l’épisode inédit des « gilets jaunes » pour se lancer dans la bataille parisienne qu’il espère bien remporter facilement, au vu des très bons scores de LREM dans la Capitale et surtout grâce à l’impopularité de la maire sortante Anne Hidalgo.

Mais une fois de plus, il est gêné par le maintien de son adversaire malheureux à la primaire, Cédric Villani , ce qui risque d’altérer ses chances et malgré un programme qu’il juge convaincant, il n’arrive pas à décoller dans les sondages, ayant l’impression de faire du surplace, ce qui permet à son adversaire principale de retrouver des couleurs et de mener la course en tête, bientôt talonnée par celle que l’on attendait plus : Rachida Dati, plaçant Griveaux à la troisième voire bientôt quatrième place avant que n’arrive l’évènement qui a provoqué sa chute.

Cette chute orchestrée par un trio infernal est digne d’une série noire : un réfugié politique russe soi-disant acteur, sa complice une jeune fille de bonne famille qui aurait eu une correspondance intime avec le candidat déchu et un avocat activiste connu pour son anti-macronisme viscéral…. Les deux premiers ont été démasqués et mis en garde à vue tandis que le troisième s’est vu refusé de défendre le premier…. Un vrai feuilleton à rebondissement ….

Benjamin Griveaux parti se mettre au vert, c’est la ministre de la Santé Agnès Buzyn qui s’est dévouée pour le remplacer au pied levé avec la volonté de renverser la table à moins d’un mois du scrutin : choix aussi courageux qu’improbable, jugent certains mais celle qui a quitté à regret son ministère, malgré la menace persistante de Coronavirus et l’interminable bras de fer avec les services de santé croit en son destin politique (espérant peut-être suivre l’exemple de son ex-belle mère Simone Veil, qui occupa le même ministère et fut élue au parlement européen qu’elle présida).

Considérée comme « un poids lourd » d’un gouvernement qui en manque singulièrement et tendant la main à un Cédric Villani qui ne la refuse pas, elle peut espérer sortir d’un tunnel dans lequel s’était engouffré son malheureux prédécesseur à condition et c’est loin d’être acquis qu’une bonne odeur de retour aux fondamentaux de la vie politique retrouve le chemin des trottoirs ensoleillés et non celui des boules puantes qui flottent sur ses caniveaux ….