Rivière des Corps-Saints (Etréchy).

BEST OF EDITOS 2020

 

LE PREMIER HOMME

(EDITO DU 5 JANVIER 2020)

 

Lundi 4 janvier 1960, 13h55 : une Facel Vega visiblement engagée à vive allure s’écrase violemment contre un platane planté sur la RN6 au lieu-dit « Petit-Villeblevin » (Yonne). A bord du véhicule, quatre personnes : deux hommes et deux femmes. Le passager avant est tué sur le coup : il avait 46 ans et la France sous le choc va découvrir qu’il s’agit d’Albert Camus, un des plus grands écrivains de son temps.

Le Prix Nobel de Littérature 1957 (dont il fut alors le plus jeune lauréat) avait passé les fêtes de fin d’année dans sa propriété de Lourmarin (Vaucluse) en compagnie de sa famille qui rentrera par le train et de celle de son ami et éditeur Michel Gallimard…Ce dernier était le conducteur du véhicule, il mourra quelques jours après l’accident, tandis que sa femme et sa fille en sortiront indemnes…

La dépouille mortelle d’Albert Camus sera transférée à la mairie de ce paisible village du Sénonais qui entrera alors dans l’histoire (une stèle au milieu du village rappelle ce drame). De nombreuses personnalités viendront s’incliner sur la dépouille de l’illustre hôte avant qu’il ne soit inhumé au cimetière de Lourmarin.

Ainsi s’achevait la courte mais ô combien vie hors du commun d’un enfant d’une Algérie encore Française et dont il restera attaché sans avoir pu connaître l’issue d’une guerre coloniale qui prendra fin deux ans plus tard.

Né en 1913 dans le Constantinois (à l’est du Pays), orphelin de père (qui sera tué dans les premiers combats de la Marne à l’Automne 1914), élevé par une mère analphabète et une grand-mère autoritaire qui partirent s’installer dans les quartiers populaires d’Alger : rien de prédestinait ce petit « blanc » dont les ancêtres venaient d’Espagne à connaître une telle destinée. Grâce à l’obstination d’un instituteur visionnaire, Monsieur Germain, qui réussit à convaincre un environnement familial hostile, de lui faire poursuivre des études secondaires puis supérieures lui ouvrant ainsi la porte d’une évidente ascension sociale…

Cette enfance pauvre mais honorable dans un environnement où « la misère était moins pénible au soleil », avec ses plaisirs simples (la baignade, le football) constitueront un des marqueurs forts de l’existence de l’écrivain. Frappé par la tuberculose, il ne pourra passer l’agrégation de Philosophie. Cela ne l’empêchera pas de venir en Métropole dans les années 40 où il sera introduit dans le microcosme Germanopratin, se liant d’amitié avec Mauriac, Sartre ou Beauvoir.

Engagé dans la Résistance, il participe à la création du quotidien Combat tout en entamant une carrière littéraire et théâtrale qui va vite être couronnée de succès. Ses romans : « L’Etranger », « la Peste » seront de grands succès de librairie, ses pièces de théâtre telle « Caligula » lui apporteront une grande notoriété.

Le combat intellectuel de Camus sera axé sur le thème permanent de la révolte, le mettant en marge des intellocrates Français, à l’instar d’un Sartre prônant la Révolution qui sera frappé de cécité sur les crimes du Régime Stalinien. Taxé de naïf par ses détracteurs, l’auteur de « Noces » sera toujours plus considéré comme un artiste que comme un philosophe….

Quant à la question Algérienne, il optera pour la nuance, à l’opposé des extrêmes (soutien au FLN ou OAS), se prononçant pour une Algérie Française mais accordant plus de droits aux minorités brimées (tels les Kabyles), ce que lui reprocheront les éléments les plus radicaux ou mêmes les observateurs plus modérés, convaincus par l’issue d’une indépendance inéluctable….

Soixante ans après sa disparition, Camus reste dans toutes les mémoires et demeure un des écrivains français les plus lus dans le Monde, les plus étudiés dans les écoles de France et d’ailleurs et dont le style et le combat mené reste toujours d’actualités, n’ayant pris que peu de rides.

Personnage honoré, il aurait pu connaitre le suprême honneur de rentrer au Panthéon sous l’égide de Nicolas Sarkozy mais une partie de sa famille s’opposa fermement à ce projet…. Peu importe, finalement, la gloire post-mortem de l’homme révolté vaut bien tous les hommages et pour revisiter le parcours, rien de tel que de relire ce qui est devenu « le Premier Homme », un manuscrit inachevé trouvé dans sa sacoche parmi les débris de l’accident et qui sera publié post-mortem en 1994.

On y découvre un récit plus ou moins autobiographique dans lequel Camus effectue un retour aux sources dans son pays d’origine : à la recherche de ses racines, d’un père qu’il n’a pas connu et ses interrogations sur un pays natal dont l’issue lui échappe mais le destin l’empêchera ad vitam aeternam de trouver des réponses à ses questions existentielles….

 

 

 

 

 

 

A PARTIR DE CETTE LIMITE VOTRE TICKET EST TOUJOURS VALABLE

(EDITO DU 5 FEVRIER)

 

Ainsi nos amis Britanniques ont divorcé de l’Europe après 47 ans d’une union souvent tumultueuse. Enfin, presque divorcé car il reste le plus dur à faire : réussir complètement les modalités qui devraient finaliser cette séparation avec le désormais ex-partenaire et cela ne risque pas d’être une partie de plaisir…

Après trois ans et demi d’un interminable feuilleton qui aura connu plein de rebondissements  affolant au passage les chancelleries européennes et surtout finissant par exaspérer les citoyens de la « perfide Albion », qu’ils soient pour le maintien ou le retrait de l’UE  et qui auront entendu parler du Brexit matin, midi et soir subissant l’impuissance d’une classe politique à sortir de ce qui devenait une véritable quadrature du cercle….ont aperçu le bout du tunnel sous la Manche qui s’est soudain éclairci….

Au premier jour fut le commencement : celui d’un pari osé d’un Premier Ministre, David Cameron, digne héritier de la Dame de Fer, Margaret Thatcher qui voulait comme elle bretter le fer avec ces messieurs de Bruxelles et qui n’obtenant pas assez vite ce qu’il réclamait lança l’idée d’un referendum pour la sortie du Royaume-Uni, jusque comme ça pour voir……Tralala….

On connait la suite : à la surprise générale, le « Yes » à la sortie de l’Union Européenne a été voté par 52 % des votants. Les Brexiters, sont issus en majorité des régions défavorisées et ont « damé » le pion aux Remainers, provenant quant à eux du Grand Londres prospère ou de l’Ecosse aux velléités indépendantistes bien connues….

L’Europe a donc vécu ce résultat comme une véritable onde de choc : pensez donc la troisième économie européenne décidant de claquer la porte de la vénérable institution Bruxelloise…

La France, la première s’est émue de ce résultat (bien qu’elle fût soixante ans plus tôt farouchement opposés à l’adhésion British proposée dès 1961), voyant comme un signal inquiétant lancé à une Europe dont la fragilité politique et économique est déjà bien entamée…

Parmi les Brexiters en chef, un certain Boris Johnson, alias Bojo, ancien journaliste à…Bruxelles, naguère maire de Londres et surtout personnage excentrique voire bouffonesque pour certains et qui s’en est donné à cœur joie pour voir dans ce résultat le « retour à la grandeur britannique, sortie des chaines européennes ». Mais les semaines qui ont suivi ont également plongé la Grande-Bretagne dans l’amorce d’une grande incertitude économique : fuite des entreprises, dévaluation de la Livre, inquiétude des marchés financiers, colère des nations Irlandaise et Ecossaise, etc….

La valeureuse Térésa May devenue Premier Ministre, d’abord « Remainer » convaincue s’est transformée en « Brexiter » par la force des choses et aura tenté en vain de trouver plusieurs accords de sortie lors d’exténuants marathons entre Londres et Bruxelles, sermonnés par de rudes négociateurs et retoqués par un Parlement Britannique hostile à trouver un quelconque compromis….

Elle a fini par jeter l’éponge, certains observateurs ont cru entendre sonner le glas de la sécession britannique, prompte à regagner la maison Europe mais son successeur proclamé, le toujours fantasque Boris Johnson en a décidé autrement, se voulant l’artisan d’une sortie coûte que coûte même avec un « no deal ».

Un grand nombre d’observateurs ne donnait pas cher de la durée du séjour de Bojo au 10, Downing Street tant l’homme est imprévisible , mais le rusé Boris a tenté un coup de poker : dissoudre le parlement, espérant dégager alors une majorité susceptible de mener à bien cette bien épineuse entreprise… et son audace lui a donné raison : une large majorité conservatrice claire nette et surtout acquise est sortie des urnes, balayant au passage les ambitions du bien pale opposant Travailliste Jeremy Corbyn….

Ce succès électoral incontestable a changé la donne, donnant une légitimité au Premier ministre pour mener à bien son entreprise de sortie de l’Union cette fois-ci avec l’aval du Parlement, ce qui a été fait le 1 er Février.

Le retrait des drapeaux britanniques à Bruxelles et le départ des députés de Strasbourg a donc marqué les esprits, échauffé certains avec la décision d’interdire les zones de pêche de Guernesey aux bateaux français, mesure retirée depuis….

Mais comme nous l’avons dit, tout reste à faire dans la négociation des accords économiques en cours. A la barre pour mener la bataille, le « montagnard » Michel Barnier dont les talents de négociateur habile et intraitable ne sont plus à démontrer face à un homme proche de Bojo, David Frost….

Parions que les deux hommes ne se feront pas de cadeau, chacun souhaitant tirer le meilleur parti possible de ces discussions. Les déclarations fracassantes de Boris Johnson, souhaitant faire de son pays, un « nouveau Singapour sur Tamise » avec l’œil bienveillant d’un Donald Trump ne doivent pas faire oublier la forte dépendance des Britanniques envers l’Europe (près de 50 % de ses exportations, contre 7% dans le sens inverse) et que le risque d’un « no deal » en cas d’enlisement ne favoriserait personne et surtout pas le Royaume-Uni qui pourrait alors voire poindre un risque de démantèlement (notamment l’Europhile Ecosse ou l’Irlande du Nord) qui serait très préjudiciable pour le pays de sa très gracieuse Majesté….

La meilleure issue à ces âpres discussions serait bien sûr un accord à l’amiable entre les deux parties permettant au Royaume-Uni de continuer à profiter à l’extérieur des avantages du marché unique mais le calendrier va s’avérer chargé et surtout court dans le temps en sachant que Johnson refusera de le prolonger au-delà de la fin de l’année comme cela lui a été proposé…

Pour conclure, un peu d’humour que ne renierait pas Bojo, conscient de sa bonne étoile : le Royaume-Uni pourrait être noyé dans un épais brouillard d’incertitude : le Continent européen serait alors être coupé du Monde……

 

 

LA GRANDE FROUSSE

(EDITO DU 10 MARS)

 

En 2017, Astérix et Obélix, les deux plus célèbres de nos héros de BD affrontaient le pilote de char Coronavirus, ce dernier assisté de son fidèle Bacillus dans « Astérix et la Transitalique ». Certains internautes avertis ont malicieusement sorti des archives cette anecdote, sorte de clin d’œil au SRAS (Syndrome Respiratoire aigu sévère) qui avait sévi en 2003, dont l’origine se situait déjà en Chine pour se propager vers le Vietnam voisin, affectant près de 8000 personnes et provoquant la mort de 600 d’entre eux….

L’histoire se répète mais avec une plus grande ampleur cette fois et depuis plus d’un mois, ce nouveau Coronavirus, appelé COVID-19, qui a commencé à sévir dans la province de Wuhan, en Chine ne cesse de gagner du terrain à travers le monde, provoquant des sentiments contradictoires selon les populations concernées :  mêlant de la crainte, de l’indifférence ou de l’attentisme….

Comme le SRAS quinze ans plus tôt, le COVID-19 est apparu au cœur de ce que l’on appelle à présent « l’Usine du monde » : la Chine, devenue depuis cette époque la deuxième puissance économique mondiale sur la forme mais qui demeure un pays émergent et  est toujours dirigée par une implacable oligarchie communiste qui cultive le goût du secret sur le fond, mais cette fois-ci, l’ampleur de contagion du virus a contraint les autorités de Pékin à prendre des mesures drastiques pour tenter de  le freiner .

Les quelques cinquante-six millions de la région industrielle de Hubei ont donc été mis en quarantaine (et le sont d’ailleurs toujours), des infrastructures nouvelles (hôpitaux) ont été mis en place pour montrer au reste du monde que le gouvernement de Pékin contrôlait la situation.

 

Nous autres occidentaux ont regardé ce phénomène de façon plutôt détachée, mais l’arrivée des premiers cas constatés chez nous auront commencé à susciter des inquiétudes croissantes : les plus imbéciles de nos contemporains y ont vu une nouvelle incarnation du « péril jaune », n’hésitant pas à invectiver dans la rue quelques membres de la communauté chinoise, les jugeant responsables de ce début d’épidémie….

La rapide et brutale contagion intervenue en Italie a commencé à angoisser nos compatriotes, sachant que le virus franchirait alors les Alpes et que la fermeture des frontières, contrairement à ce que pense Madame Le Pen et ses alliés n’a jamais empêché une inéluctable propagation….

 

En un mois, le Coronavirus a touché plus de 100 000 malades à travers le monde et tués plus de 3 000 Personnes, dont plus de 80 % en Chine mais il croît à présent moins que dans le reste du monde : en Corée du Sud, en Iran ou en Italie, le nombre de victimes ne cesse de s’allonger et les autorités locales, à défaut de remède rapide ne peuvent mettre en place que des mesures de prévention (quarantaine, hygiène renforcée, absence de contacts physiques avec autrui) …

La France n’échappe pas à la règle : le virus occupe la une de l’actualité, supplantant même le feuilleton de la réforme des retraites et surtout celui des municipales qui pourtant auront lieu ce dimanche. Toutes les régions de l’Hexagone sont à présent touchées mais certaines plus que d’autres : les Hauts de France (dont l’Oise) et le Grand Est (partie Alsacienne) vivent à l’heure de l’isolement : écoles fermées, réunions ou manifestations annulées, etc…

 

Depuis une semaine, alors que notre voisin Italien, à présent le plus touché après la Chine, a décidé de mettre tout son territoire « en quarantaine », nous nous approchons lentement mais surement de la phase 3, celle qui nous amène vers un pic de l’épidémie : le nombre de cas augmente de façon constante et malheureusement celui des victimes aussi, même s’il est moindre que chez nos amis Transalpins.

Nous savons déjà que cet insolite virus continue de faire plonger les bourses mondiales, laissant poindre quelques signes sensibles de baisse de croissance économique que les plus alarmistes assimilent au choc de 2008, tandis que d’autres relativisent en invoquant plutôt une « sorte de mauvaise grippe économique et sociale » qui impactent les rouages économiques majeurs tel le tourisme, les PMI-PME, le transport aérien et même le sport, sorte d’opium du peuple dans les moments de doute….

La question que tout le monde se pose : quand cela s’arrêtera-t ’il ? Nul ne le sait. Chaque soir, le très didactique Professeur Salomon, directeur général de la Santé publie son bulletin sur l’évolution du virus dont on ne peut que déplorer que l’inexorable progression tandis que le nouveau ministre de la Santé, Olivier Véran qui a su trouver ses marques très rapidement ne cesse de marteler nos concitoyens de bons conseils en matière de prévention (y compris à ses collègues du gouvernement dont certains ont même été touchés) …

L’Organisation Mondiale de la Santé, les différentes unités de recherche continuent à se concerter pour enrayer ce nouveau « mal du siècle » mais la capacité à trouver un remède rapidement reste une équation à plusieurs inconnues.

Une chose est certaine, ce maudit Coronavirus a chamboulé l’ordre du monde : la Chine triomphante hier vis-à-vis des anciennes grandes puissances économiques a marqué des signes d’essoufflement et le ralentissement  voire l’arrêt brutal de son activité a fait prendre conscience à nos pays que notre hyper-dépendance (en matières d’approvisionnements automobile, textile ou informatique) risquait de mettre à mal un bon nombre de nos PME, à la trésorerie fragile  et même de certains grands groupes ne pouvant vivre ad vitam aeternam sur leurs stocks anciens….

Ce qui interpelle certains sur la nécessité de « relocaliser » dans nos chers et vieux pays mais qui pourrait impliquer un changement de mentalité chez nos contemporains, qui fustigent les méfaits de la mondialisation (fermeture d’usine) tout en en profitant allègrement (le low coast, sorte d’amuse-bouche de la surconsommation).

D’autres s’interrogent sur la durée de ce mauvais feuilleton : très court, il ne ralentira que partiellement l’économie mondiale, plus long, il pourrait constituer un véritable choc économique, semblable à la crise de 2008, mais tout cela ne reste qu’un vaste champ d’extrapolations et de remue-méninges pas forcément salutaires.

Paradoxalement, cette période anxiogène a mis en exergue les différents problèmes notamment en matière d’écologie : une Chine qui ne fait plus tourner correctement ses usines et met en quarantaine ses habitants permet de faire chuter la pollution de manière sensible……

Tous les gouvernements sont sur le pied de guerre, même Donald Trump qui a troqué ses formules narquoises par un ton plus grave et surtout plus responsable. On sait généralement que le retour des beaux jours peut influer sur l’éradication d’un virus, à défaut de trouver un vaccin rapide mais on sait également que les prévisions météorologiques sont comme l’économie : une science souvent inexacte…….

 

 

 

 

LA NUIT FINIRA

(EDITO DU 1 er Avril)

 

 

Certains soirs, les cloches des églises vides des villes et villages de France sonnent peu avant la tombée de la nuit à l’instar des habitants confinés fidèles à un rituel et qui applaudissent à 20 heures un personnel hospitalier qui fait souvent plus que son devoir en bravant l’odeur de la mort qui rôde…. Depuis deux semaines déjà, notre beau et vieux pays vit au ralenti, en régime de semi-liberté nécessaire comme près de la moitié de l’humanité d’ailleurs….

Certains seraient tentés de faire une comparaison avec la période de l’Occupation que connut la France entre 1940 et 1944 : un couvre-feu dans certains secteurs, une attestation à procurer comme naguère le Ausweis, le marché noir (les masques), le franchissement de la Zone libre (« les supermarchés »), des rues de Paris complètement désertes comme en Juin 40, des « corbeaux » qui « conseillent » à leur voisin issu du personnel soignant de déguerpir comme s’ils étaient des « terroristes », des « poches de résistance » qui s’organisent par ci par là et une grande majorité qui subit les évènements en attendant des jours meilleurs….

Clap de fin. Retour à la réalité. C’est vrai le moment que nous vivons un moment totalement aussi inédit qu’imprévisible malgré les dénégations des pseudo-prophètes ou tout autre « has been »de la vie publique qui tentent piteusement de faire le buzz dans un moment aussi délicat. Il y a un temps pour tout comme l’a rappelé le Premier Ministre Edouard Philippe, au cours de son intervention télévisée qui aura eu le mérite d’avoir employé un ton aussi grave que pédagogique salué par ses adversaires les plus coriaces…On fera le procès de Riom après....

Notre propension franco-française à nous autoflageller ou encore à nous complaire dans des polémiques aussi stériles que vaines auront été vite balayées pour laisser la place à une prise de conscience collective : le respect d’une règle du jeu qui consiste à sortir victorieux de cette partie complexe en jouant la carte de la responsabilité de chacun et d’un civisme aussi exemplaire que possible.  Comme quoi un peuple certes indiscipliné et souvent rétif à l’autorité sait se transformer dans cette épreuve si coercitive…

Au fil du temps, un sondage laisse que le confinement était majoritairement supporté par une petite majorité de nos concitoyens, porteurs de vertus insoupçonnées : le retour à certains fondamentaux : le retour à l’entraide, au dialogue familial, à une certaine introspection sur le sens de notre vie, etc…

C’est vrai, on a pu aussi constater paradoxalement l’amplification de certains maux de notre société : la solitude et ses ravages, l'explosion des violences conjugales et familiales et les risques d’une poussée anxiogène pour donner suite à la boulimie télévisuelle exclusivement consacrée au virus laissaient remonter à la surface des odeurs nauséabondes dans ce marais d’incertitude….

En France, comme dans le reste du monde, on ne peut que continuer à déplorer l’inexorable progression du mal dont le pic n’est toujours pas atteint et dont nous ne pouvons dater précisément dans le temps. Pour l’instant la liste interminable des victimes prend le pas sur le nombre de personnes qui guérissent pourtant plus nombreux……

Certains évoquent déjà le déconfinement qui dépendra notre attitude civique d’une part et des progrès médicaux en la matière d'autre part, en sachant qu’il s’agit de facteurs à moyen terme (traitement, vaccin) tandis que le court terme (dépistage massif, désengorgement des hôpitaux) reste la priorité absolue pour voir la courbe de progression enfin s’infléchir….

Ce qui est certain que cet épisode unique laissera des traces dans l’après-Coronavirus : le déconfinement et le retour à la normale se feront par paliers : au consomment ne succédera pas un grand raout sur les places publiques ou les grandes avenues pour fêter « la libération » mais plutôt une longue convalescence durant laquelle nous devrons être les acteurs de la reconstruction de nos quotidiens tant au niveau politique, sociétal, social et bien sûr économique. Au lendemain de ce très mauvais rêve, nous serons un temps les « paumés du petit matin » prêts à reprendre nos vies d’une façon nouvelle, humblement convaincus que durant notre long « quart d’heure de résistance » nous savions subconsciemment que la nuit finirait….

 

 

 

TUTTI FRUTTI

(Edito du 13 mai)

 

 

Richard Wayne Penniman est mort à l’âge de 87 ans, non pas du Coronavirus comme on pouvait le craindre mais des suites d’une longue maladie, quelque part dans le Tennessee, au cœur des Etats-Unis.

On ne sait pas s’il avait quelque chose de Tennessee, celui qui avait pris comme pseudonyme Little Richard, qui d’ailleurs n’était pas si « Little » que ça, puisqu’il mesurait quand même 5 pieds 11 pouces (1m80).

 Il s’est éteint dans le même Etat que le King « Elvis » et dont la Capitale, Nashville est également celle du Blues et du Rock…Tout un symbole, n’est-ce pas ?

Né en 1932 à Macon (Georgie), au sein d’une famille nombreuse et plutôt dévote, le petit Richard se démarque précocement du reste de sa famille en affichant d’emblée sa différence : des penchants homosexuels et un goût pour la musique qui provoquent les foudres de son géniteur qui le traite même de « moitié d’homme » le poussant à quitter ce carcan familial sans avenir (surtout pour ce père qui finira abattu à la sortie d’un bar).

Mais l’émancipation du fils maudit ne sera pas pour autant salvatrice au départ : pensez donc dans cette Amérique puritaine des années 50 : être noir, efféminé et avec une jambe plus courte que l’autre, il lui aurait plus manquer que d’afficher des sympathies communistes pour en faire un paria absolu….

Trêve de plaisanterie, il en faut plus pour décourager ce « fondu » inné de rhythm’n’blues et de gospel qui a la « niaque » de ceux qui croient en leur destin et d’ailleurs la chance va vite lui sourire en signant avec sa première maison de disques RCA dès 1951.

Lors de sa disparition, beaucoup de commentateurs l’ont désigné comme le « créateur » du Rock n’Roll, ce qui n’est pas vraiment exact, car cette « nouvelle vague » musicale fut plutôt une œuvre collective qui a germé au tout début des années 50 mais dont les racines sont bien plus anciennes, ses compagnons de route ayant pour nom Muddy Waters ou encore Fats Domino……

En revanche, il fut, comme il l’autoproclamait lui-même, l’Architecte du Rock n’Roll, celui qui a posé la clé de voute de l’édifice le rendant inébranlable.

 Auteur-Compositeur-Interprète et pianiste inspiré, Little Richard sera aussi l’ange gardien de nombreux musiciens qu’il révèlera le plus souvent : les Beatles, les Stones, Jimi Hendrix, Elton John David Bowie ou encore Prince, certains d’entre eux partageront même la scène avec lui et n’hésiteront pas lors de sa disparition à en faire leur « père » spirituel à qui ils doivent presque tout….

On a beaucoup évoqué son tube absolu, le très entrainant « Tutti Frutti », qui n’est en rien la version originale de « Salade de fruits » de Bourvil, mais plutôt une chanson explicite sur les amours défendus et qui est devenu un Standard repris notamment par Elvis et ayant donné de multiples versions adaptées à l’étranger….

Avec ses tenues excentriques, ses coiffures hallucinantes et un maquillage forcé, il donne tout sur scène, jouant du piano debout bien avant l’heure, sachant chauffer une salle comme personne : il aurait certainement réussi à faire swinguer un cul-de jatte….

Les tubes s’enchaînent devenant des classiques du Rock au fil du temps, à l’instar de « Lucille » ; « Long Tall, Sally » ou « Rit it up » mais comme tout individu vivant à 200 à l’heure, il aura plusieurs vies : l’homo devient bi et se marie, adopte un fils,  plaque tout en devenant pasteur adventiste, chantant des gospel dans les paroisses, puis abandonne la piété pour retrouver de bons vieux rites paganistes, rencontre Quincy Jones, directeur artistique chez Barclay et mentor de nombreux groupes (en France : les Double Six) et bien sûr de Michael Jackson…

Ces cinquante dernières années, Little Richard continuera à « bouffer » encore beaucoup de scènes, gardant sa fraîcheur et son excentricité tout en connaissant une relative « traversée du désert »

Il fera même l’acteur dans quelques solides nanars au cinéma mais considérons ça comme une parenthèse….

En 2006, l’ancien gamin de Georgie collaborera également avec deux de ses fans français, deux enfants de Paname : Jean-Philippe Smet (idole des jeunes, né dans la Rue) et Claude Moine (alias Mr Eddy, le grand gaillard avec une chaussette noire) : le trio interprétera : « Something’ else » d’Eddie Cochran en version bilingue : « Elle est Terrible » ! ».

Les enfants du Rock pleurent donc un de leurs papas, un de ceux qui savait faire le show, les musiciens : un chef d’orchestre mais qui ponctuerait sa prestation par un « Wooh » autant sensuel que débordant d’enthousiasme…

« Show must go on » clamerait ce vieil excentrique qui aurait aimé cette épitaphe sur sa tombe, plus ou moins emprunté à Neil Young : « Rock n’roll Will never die, This Is the story of Little Richard » …

 

  

MAIRE COURAGE

(Edito du 30 Juin)

 

Imaginez un enfant à qui les parents demandent : « que comptes-tu faire quand tu seras plus grand ? » Et lui de répondre du tac au tac « Eh bien, je veux être…Maire ». « Maire ? Ah, le joli métier, si petit et déjà de l’ambition ! » répondront certains avec fierté tandis que d’autres soupireront : « Maire, mais tu n’y penses pas, c’est un métier dangereux, tu veux finir comme les Balkany ? »

Après la plus longue campagne municipale de l’histoire de la Cinquième République pour cause de pandémie, on aura vu un second tour se dérouler trois mois après le premier, agrémenté de quelques épisodes aussi insolites que cocasses : des maires battus au premier tour condamnés à jouer les prolongations tandis que leurs « tombeurs » trépignaient sur les « bancs de touche » sans oublier les trente mille heureux vainqueurs du Marathon du 1 er tour qui scrutaient au loin, non sans inquiétude, les cinq mille autres potentiels vainqueurs du second tour afin de pouvoir fermer « la boucle » avec ces retardataires malgré eux……

Mais ce dimanche 28 juin, la page des élections municipales a pu se refermer ou presque car vendredi prochain, ce sera le 3 -ème tour concernant alors l’élection du maire et de ses adjoints et qui clôturera définitivement cette consultation électorale ….

35 000 maires seront tous élus en Métropole comme dans les Outremers. Un mandat de six ans, plus long que celui du Chef de l’Etat ou d’un Député mais identique à un sénateur ou un conseiller départemental.

Six ans, dans une vie c’est court mais au cours d’un mandat c’est plutôt long et surtout très chronophage…

Sitôt élu, le premier magistrat se transforme presqu’en moine-soldat : les trente-cinq heures, les week-ends prolongés ou autres vies de loisirs sont à ranger au placard, sans parler d’une vie de famille parfois un peu mise entre parenthèses car on devient maire 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 et 365 jours par an…….

Mais pour autant, est-ce un métier ou plutôt « une fonction » que l’on occupe en plus de son travail quotidien ? La question mérite d’être posée tant l’image qu’incarne le premier magistrat d’une commune a pu évoluer de façon considérable…

On peut affirmer qu’il s’agit à présent d’un véritable « statut » depuis les lois de 1992 qui ont mis en exergue plusieurs mesures concernant aussi les codifications des indemnités de fonction, que les droits à la formation ou encore un régime de retraite et de congés ouvrant les voies à une professionnalisation évidente…

Aux dires de beaucoup, il reste le « mandat politique » le plus apprécié par la majorité des Français même si ces derniers s’abstiennent de plus en plus (même hors COVID) tout en contestant paradoxalement la légitimité des édiles municipaux élus par un faible nombre d’électeurs inscrits !

Naguère, le maire pouvait se contenter d’être uniquement un notable qui déposait des gerbes de fleurs sur les monuments aux morts lors des célébrations ou qui faisait des courbettes dans les salons lambrissés des sous-préfectures…

Aujourd’hui, les concitoyens exigent qu’il soit disponible, dynamique, compétent, porteur de projets emballants et surtout porteur de valeurs d'honnêteté sans faille....

Le couperet peut vite tomber si le Maire s’égare dans le « hors-piste » : celui qui mène au clientélisme, au copinage, conflits d’intérêts ou aux autres abus de pouvoir qui ont pu entraîner une forme de judiciarisation de l’action publique, incitant de facto certains élus à ne pas vouloir se représenter par crainte d’avoir en permanence l’épée de Damoclès au-dessus de leur tête tandis que les aspirants-candidats d’abord attirés par le chant des sirènes au son de « que Marianne était jolie » craindront finalement de susurrer « que diable suis-je venu faire dans cette galère ? »

La crise des vocations n’est jamais très loin mais restons optimistes « Devenir maire » reste tendance et s’avère être une expérience qui enrichira personnellement (à défaut de financièrement) tout homme ou toute femme ceint de l’écharpe tricolore qui occupera la fonction.

C’est vrai, les récentes enquêtes ont montré que le portrait-robot du maire est celui d’un homme blanc, de plus de cinquante ans, souvent retraité et issu des Catégories moyennes et supérieures. Les femmes, malgré la parité n’occupent le fauteuil de maire à moins de 20 % tout comme les catégories populaires….

Le maire est généralement élu à la tête d’une majorité large et solide et peut affirmer ainsi son leadership durant les six ans de son mandat face à une opposition certes représentée mais qui ne peut pas constituer un réel danger pour lui….

Oui, le maire contrôle tous les rouages de l’action municipale, est officier de police judiciaire et peut retirer ses délégations à des adjoints frondeurs ou récalcitrants…Il sait cependant que deux craintes peuvent le hanter durant son mandat : être dans le viseur de la Cour régionale des Comptes en cas de gestion hasardeuse et en fin de mandat subir les foudres d’électeurs mécontents de son action qui peuvent alors mettre un terme à son bail….

Avec le développement imposé des Communautés de communes, (elles sont plus de 1200 en France), le maire qui naguère aimait « Clochemerle » doit à présent composer avec ses collègues, craignant toutefois de perdre la majorité de ses pouvoirs au profit de l’intercommunalité, d’où l’idée de développer des « conseils de maires » au sein de ces instances afin de pouvoir renforcer de façon significative la position de chacun d’entre eux….

 

 

 

 

 

LE DEUXIEME SOUFFLE

(Edito du 21 Juillet)

 

 

Ils se sont mis enfin d’accord à l’unanimité, les 27 membres de l’Union Européenne. Ce qui constitue une première, pour une institution souvent taxée par les Eurosceptiques « d’usine à Gaz bureaucratique » ….

En effet, à l’aube du cinquième jour d’une négociation autant rude qu’ardue, ils ont réussi à se mettre d’accord pour amorcer un ambitieux plan de relance de 750 milliards d’euros afin de sortir le Vieux Continent du marasme économique provoqué par la crise sanitaire.

Le Belge Charles Michel, président du Conseil Européen n’a pas caché son soulagement. Malgré les premières lueurs de l’aube, il a certainement pu déboucher le Champagne pour fêter avec ses homologues cet évènement heureux qui a coïncidé avec le jour de la Fête Nationale du Plat Pays et du 95 -ème anniversaire de son illustre ainé, le très Europhile et fédérateur Jacques Delors. Tout un symbole.

Mais soyons clair, l’accouchement de ce plan de grande envergure s’est effectué dans la douleur, avec de longs moments d’incertitude tant certains des acteurs étaient réticents à le voir naître….

Le dénouement heureux est certainement à imputer au couple Franco-Allemand, qui par tactique et opiniâtreté a su faire fondre la barrière de glace hostile des « pays frugaux » (Suède, Danemark, Autriche et Pays-Bas), gardiens de l’orthodoxie budgétaire (enfin presque, quand on sait qu’un d’entre eux héberge de nombreuses sociétés-écrans), se revendiquant au départ cigales et donc réfractaires aux fourmis dépensières d’Europe du Sud…

Les pays du Nord de l’Europe ont certes cédé au nom de l’intérêt général, demandant cependant des gages à leurs partenaires (dont la réduction du montant des subventions, passant de 500 millions à 390), la France obtient 40 milliards (la moitié moins que l’Italie ou l’Espagne) qui correspondront à près de la moitié du montant de relance initialement prévu par le gouvernement,  en outre disponible de suite, permettant de facto de pouvoir relancer la machine économique dans les plus brefs délais comme l’a rappelé notre Grand Argentier, Bruno Le Maire.

A quoi serviront ces 40 milliards ? Emmanuel Macron a donné d’emblée la réponse pour faire taire les commentaires acides de l’opposition : d’abord à financer la transition écologique, puis l’emploi des jeunes ou encore financer les petites et moyennes entreprises si durement touchées, etc… Et sans que cela, coûte le moindre euro au contribuable français…

Mais soyons clairs, cette dette commune que l’ensemble des états se devra de rembourser devra être réglée par un échelonnement s’étendant jusqu’à 2058 (ce qui permet de voir venir, tout de même) ….

La France comme ses partenaires vit à l’heure des vacances et de la relative insouciance avant le « choc de la rentrée » : on a vu un « Week end classé « Rouge » par Bison Futé qui semble bien éloigné d’une « France Verte » de l’après-confinement.

Olivier Véran, Ministre de la Santé, avec l’appui du Professeur Delfraissy, directeur du Conseil Scientifique, a cherché à rappeler à nos concitoyens que le Virus continuait à circuler, et du fait d’un relâchement  constaté et surtout du nom respect de plus en plus fréquents des gestes barrières laissaient présager les risques sinon d’une nouvelle vague mais plutôt d’un re confinement très localisé, comme cela a pu se produire dans certaines régions d’Espagne, de Chine et même d’Allemagne….ou plus inquiétant, l’implantation de clusters remarqué dans des territoires jusqu’alors épargnés (l’Ouest de la France, en Bretagne et en Mayenne ou dans le Sud-Ouest)….

Le port du Masque est devenu obligatoire dans les lieux clos mais on constate parfois que ceux qui naguère pestaient contre la pénurie des débuts de confinement sont aujourd’hui réfractaires à le porter spontanément. Le réflexe d’avoir toujours un masque dans sa poche, à l’instar des pays asiatiques ne fait que germer chez nos contemporains mais progresse cependant, mélange de raison et de peur, probablement…

C’est vrai, dans un pays où les habitants aiment se faire la bise ou des papouilles, se taper dans le dos et faire la bringue en se frottant n’est pas en adéquation avec un mode de vie qui se voudrait parfois trop coercitif et entravant les libertés individuelles….

Durant le confinement, beaucoup ont fait des promesses de changement, comme on peut en faire le jour de l’An et qui comme chacun sait sont rarement suivies d’effet. La prise de conscience écologique, la volonté de réindustrialisation, la reconquête des territoires perdus ou tout simplement un nouveau chemin de vie resteront-ils au stade des projets avortés ? Nul ne le sait véritablement sous son masque protecteur mais en attendant profitons de ce second souffle pour nous tenter de nous réinventer….

 

 

 

LES CEDRES QUE L'ON ABAT

(Edito du 6 Août)

 

 

Ce mardi 4 Août 2020, vers 18h00, une double explosion d’une violence extrême s’est produite dans le port de Beyrouth, dévastant intégralement celui-ci ainsi que tous les quartiers environnants…laissant craindre une tragédie humanitaire : et ce fut le cas, au fil des heures : plus de 180 victimes, autant de disparus et près de 5 000 blessés et encore le bilan n’est que provisoire, sans oublier plus de 300 000 habitants devenus des sans-abris. Un désastre……

L’effet de souffle que les spécialistes comparent à un séisme de magnitude 3 a été ressenti à des kilomètres à la ronde et l’origine du drame a été rapidement identifié : une cargaison de 2 750 tonnes de Nitrate d’ammonium, se trouvait entreposée sans aucune barrière de sécurité dans un hangar du port, six ans après avoir été déchargée par un bateau Moldave !

Si les autorités locales ont qualifié de drame « d’accident industriel », il n’en demeure pas moins que ce comburant souvent utilisé comme base de nombreux engrais azotés doit être stocké avec les plus grandes précautions au risque de provoquer d’autres catastrophes : ce fut le cas à Toulouse, où l’explosion liée au même produit au cœur de l’usine AZF fit plusieurs victimes et ravagea un quartier de la ville…

Il est clair que la tragédie de Beyrouth surgit alors que le Pays du Cèdre connait déjà une grave crise économique, ce qui fait dire à certains que le Liban n’est plus au bord du « Gouffre : il est déjà tombé dedans ».

Quelques heures avant l’explosion, plusieurs manifestants protestaient contre les sempiternelles « coupures de courant » qui pourrissent le quotidien de nombreux libanais devant la compagnie d’Electricité, jugée par certains observateurs comme un gouffre financier et un temple du clientélisme…  

L’économie est rongée par une monnaie en chute libre, une hyperinflation constante, une classe moyenne laminée, une poussée exponentielle du paupérisme (plus de la moitié de la population vivrait en dessous du seuil de pauvreté), sans oublier un chômage endémique… Bref, un état au bord de la faillite….

Il est loin le temps où le Liban était surnommé « La Suisse du Moyen-Orient » et Beyrouth, « Le Paris du Levant ». Entre son indépendance en 1943 et le début de la guerre civile en 1975, ce pays né après la première guerre mondiale et qui vécut sous Mandat Français (comme son voisin Syrien) connut une période de prospérité économique, se développant dans les secteurs du Tourisme, de l’agriculture et surtout des services (banques, assurances), attirant de nombreux investisseurs et des touristes et faisant figure de modèle pour ses voisins…. Mais comme chacun sait la « roue a tourné » du fait de la terrible guerre civile qui ruina le Liban entre 1975 et 1990.

La paix retrouvée, ce pays « mutilé » par des années de guerre, n’avait pourtant jamais baissé les bras et a retrouvé assez rapidement une nouvelle prospérité économique avec un accroissement sensible du niveau de vie et le retour des investisseurs et des touristes mais en 2006, du fait de la guerre Israélo-Libanaise, le pays est retombé rapidement dans l’incertitude et la récession.

Pays à part dans cette région du monde, avec 7 millions d’habitants dont plus de 2 millions sont des migrants, Le Liban terre d’accueil dans les périodes heureuses comme dans les plus sombres vit un cauchemar éveillé, subissant avec fatalité sa débandade économique mais également la faillite de ses institutions, politiques, sociales et financières, minées par la corruption, le clientélisme et surtout une incompétence de ses dirigeants, jugés grands responsables de tous les maux et catastrophes qui gangrènent le pays…

Ce régime démocratique et parlementaire mis en place après la guerre civile était censé apporter la concorde civile et une plus grande équité de représentativité des communautés (Chrétienne, Chiites, Druzes, Sunnites) est en fait dominé par le « clanisme » et les « querelles multiconfessionnelles » qui se divisent pour mieux régner mais anarchiquement …

Si un grand nombre de Libanais, sont encore sidérés par le drame, ils restent très en colère contre un système dont ils souhaitent majoritairement l’éradication, cependant l’heure n’est pas au règlement de comptes mais au début de la reconstruction qui sera longue et incertaine.

Il est clair que sans aide internationale, le pays ne pourra pas se relever de sitôt. La France qui entretient depuis de longues années des liens d'amitiés forts avec ce pays partiellement francophone a d’ores et déjà apporté son aide en envoyant sur place des équipes de secours (dont les marins-pompiers de Marseille) …

En outre, Emmanuel Macron a tenu à rendre visite à ses homologues libanais, pas uniquement pour tenter de « renforcer » la perte d’influence de notre pays dans cette région du monde mais également pour rappeler que l’aide internationale ne doit pas rester vaine, ce qui signifie que le pays ne fasse pas renaître de ses cendres cette oligarchie politico-financière corrompue qui a conduit le pays dans le mur mais plutôt à faire de chaque libanais un acteur de ce changement, sinon d’autres explosions et d’implosions risqueront de se produire…….

 

 

LE CHANT TRISTE DU BECASSEAU MAUBECHE

(EDITO DU 17 SEPTEMBRE)

 

 

Ils ont deviné que l’heure était grave : c’est la raison pour laquelle ils se sont donné rendez-vous pour proposer à l’unisson un concert d’adieu à celui qui les avaient sortis de l’anonymat.

Ils étaient tous là, sans exception, pour exprimer leur détresse : l’Avocette élégante, le Bécasseau maubèche, la Barge à queue noire, la Bécassine des marais, le Chevalier aboyeur ou encore le Combattant varié.

Un concert mélancolique qui a résonné dans toute la baie, de façon si puissante que « les Oiseaux » d’Hitchcock ressemblait à côté à une musique d’ambiance de piano-bar….

Nous sommes en Baie de Somme, un petit paradis naturel de 70 km2, classé par les beaux sites du Monde et qui constitue une des fiertés de la Picardie, avec sa faune et sa flore incomparables, située au nord-ouest de notre beau et vieux pays…

Certains penseront que cette manifestation spontanée de ces braves petits échassiers était liée au départ d’Allain Bougrain-Dubourg, le « sénior » des Oiseaux ?

Vous n’y êtes pas du tout, Ce chant du désespoir était plutôt adressé à une autre fierté de la Picardie : Jean-Pierre Pernaut, le Pape du 13 heures qui a décidé d’abdiquer de sa lourde charge de « voix de la France » après 32 ans de bons et loyaux service, provoquant stupeur, tristesse et surtout incompréhension de ses fans inconsolables….

En signe de protestation, les cloches des églises du Crotoy ou de Saint-Valéry ont sonné le glas d’une période bénie à treize heures pétantes… Mais à « septante ans », le « Bourgmestre du PAF » a jugé sage de rendre son écharpe tricolore sans toutefois quitter les murs de la maison qui l’avait fait roi depuis qu’il y était rentré il y a quarante-cinq ans….

Retour en arrière : en 1988, celui qui n’est pas encore « JPP 1er » prend les rênes du Journal Télévisé du « 13 heures » de TF1 jusqu’alors tenu par un couple mythique : Marie-Laure Augry et Yves Mourousi qui viennent d’être gentiment remerciés pour cause de non-alibi « béton » par le patron de la Chaîne d’alors…

Le pari était osé de mettre en lumière, cet « éternel joker » qui voue toujours d’ailleurs une admiration sans bornes à son idole Mourousi, un « oiseau de nuit », volontiers provocateur et moqueur mais surtout un « surdoué » du journalisme qui a donné, malgré son apparent dilettantisme, ses lettres de noblesses à ce métier parfois tant décrié….

Jean Pierre, le « second couteau » a la reconnaissance du ventre et saura le montrer à ses employeurs, il va se forger son propre style qui va finir par le faire entrer dans la légende du sacro-saint JT, aux côtés de ses autres grands frères : Roger Gicquel, Jean-Claude Bourret ou Patrick Poivre d’Arvor. 

Quand d’autres privilégient le « Journalisme avec un grand J » tourné vers l’International et les grands sujets de société, lui préfère jouer en « seconde division », arpenter les terroirs, donner la parole à tous les petits, les exclus, les sans-grades, bref à la France d’en bas sans jamais oublier de faire un petit « coucou » à la terre de ses ancêtres, la Picardie connue pour…sa Baie de Somme….

Le temps a passé et « le remplaçant » est devenu « le titulaire », que dis-je, le « chantre du journal des régions » probablement au grand dam de France 3 et peut s’enorgueillir de rester « le leader » incontesté face à sa rivale France 2, avec ses 40 % de parts de marché (plus de 5 millions de téléspectateurs), commençant son journal par la Météo présentée par sa copine Evelyne Dhéliat (qui a commencé comme lui à l’époque ou la télé était encore en noir et blanc) et d’avoir présenté plus de 8 000 journaux : un record absolu...

Mais la France profonde, celle des ménagères de moins de 50 ans, des retraités qui comprennent les Gilets Jaunes et de ceux qui rentrent manger chez eux le midi sont restés fidèles, d’où leur désarroi à l’annonce de cette décision qui a ébranlé le Landerneau Médiatique….

Mais cette gloire médiatique a connu quelques désagréments : la moquerie permanente de ses confrères sur la réelle envergure d’une « Star » qui aime jouer les « localiers » qui s’échignent à alimenter la rubrique des « chiens écrasés »…a moins que ce ne soit de la jalousie pour cet ex-cancre qui s’est fait « tout seul » et qui a fini par réussir malgré les quolibets de l’Intelligentsia Parisienne, à l’instar  du petit « Gars de Vire » issu comme lui de la bourgeoisie Provinciale, devenus tous deux des Rastignac du Petit Ecran, le premier comme l’Homme-tronc préféré des Français et le second, l’éternel gendre idéal qui veut mourir sur son divan rouge du Dimanche….

Cependant, des problèmes de santé, la « peoplisation », l’usure du pouvoir, l’âge du Capitaine, obligé de se « confiner » pendant la Crise sanitaire ont fini par mettre en péril « sa concession à perpétué »sur le 13 heures, laissant s’accumuler des rumeurs comme celles de laisser sa place à son « Joker », le brave Jacques Legros , pourtant son cadet d’un an ou encore la sanction de ses coups de gueule sur la gestion de la crise  par l’exécutif, qui en ont plus fait « un éditorialiste du café du commerce » que la « voix de la France du 13 heures » qu’il a si longtemps incarnée, sans oublier ses bafouillages de plus en plus  fréquents par refus du prompteur..

Toutes ces péripéties l’ont probablement amené à vouloir « tirer sa révérence » de façon sage et mûrement réfléchie et une probable prémonition de se retirer avant d’apprendre par les journaux son éviction sournoise comme ce fut le cas pour une autre vedette de la Chaîne, qui suce encore les « dragées au poivre » de l’amertume…. C’est bien connu, les cimetières sont remplis de gens indispensables….

Mais le roi du JT continuera donc de faire des « piges » sur LCI, peut-être en proposant des reportages sur la « Baie de Somme » afin que les Oiseaux ne se cachent plus pour mourir mais puissent de nouveau chanter le retour du Printemps comme au bon vieux temps du 13 heures…

 

 

LE SPECTRE DE POGACAR

(Editorial du 23 Septembre)

 

 

Décidément, le COVID-19 aura fait toussoter plus d’une fois le Tour de France, à commencer par son patron Christian Prudhomme contrôlé positif, à tel point que l’on s’est d’abord demandé s’il ne serait pas purement et simplement annulé comme bien d’autres manifestations sportives, ce qui aurait été une première depuis les deux guerres mondiales….

Finalement, cette 107 -ème édition d’une longueur de 3 484 Kilomètres a bien eu lieu mais avec plus d’un mois de décalage, le Tour de France, synonyme d’Epreuve sportive « reine des vacances » est devenue Compétition de Rentrée avec toutes les restrictions qu’imposaient la Crise sanitaire : finies les foules en délire qui éructent le nom de leur champion le long des chemins, adieu les beaufs à casquettes Ricard qui escortent sur quelques centimètres la roue du maillot jaune du moment, tchao les hôtesses du tour pour cause de bisou masqué : l’ambiance a été beaucoup plus feutrée, du fait de spectateurs éparpillés ou tout simplement déjà rentrés chez eux…

Avec les défections de certains favoris, l’idée a germé que le Tour 2020 pourrait être enfin « l’année des Français », on pensait qu’avec Romain, ça allait « barder », que Julian Alaphilippe, le héros du tour 2019 pouvait prendre la tête du peloton à la hussarde ou Thibaud Pinot allait annoncer la couleur….

On connait la suite: ce potage délicieux qui mijotait dans la marmite s’est transformé en « soupe à la grimace » : à l’espoir a succédé la désillusion : une fois de plus, la dure réalité a changé de braquet : les favoris sur le papier ont rejoint la classe « contre-performance » ou abandon….Trente -cinq ans après le dernier triomphe de Bernard Hinault, il faudra encore et toujours s’armer de patience pour espérer voir un Français en «Jaune » sur les Champs-Elysées que de voir le PSG soulever la coupe de la Liga ou un Français remporter Roland Garros….

Mais le malheur des uns a pu faire le bonheur des autres. On a vu surgir du peloton deux coureurs venus de Slovénie… Slovénie ? vous voulez dire la Syldavie, ce pays des Balkans cher à Tintin et Milou dans le « Spectre d’Ottokar » ?

Mais non bien sûr, même si la Slovénie a inspiré Hergé, ce n’est pas un pays imaginaire : bien au contraire : il fait même partie de l’Union Européenne depuis 2004, grand comme deux fois l’Ile de France et peuplé d’un peu plus de 2 millions d’Habitants…

Coincé entre l’Italie à l’Ouest, l’Autriche au Nord, la Slovaquie au Nord-Ouest et enfin la Croatie au Sud, ce petit pays dynamique est issu de l’Ancienne Yougoslavie disparue en 1990 dont elle fut une des républiques les plus dynamiques économiquement, comme elle a continué à le rester dans l’Europe de Bruxelles….

Mais, la Slovénie n’est pas connue du grand public comme une nation sportive majeure, bien qu’elle excelle dans les sports de glisse, normal quand on est un pays à 70 % montagneux, qu’elle commence à faire parler d’elle au Tennis, sans parler du Football, avec un gardien de but redoutable de l’Atletico, Jan Oblak ou encore du Basket, avec l’équipe de Ljubljana qui s’est naguère illustrée au niveau européen…. Mais le cyclisme, c’était beaucoup plus improbable…avec une fédération qui compte moins de 2 000 licenciés et l’organisation d’un discret « tour de Slovénie » et pourtant, Messieurs Primoz Rogric et Tadej Pogacar ont largement dominé l’épreuve, le premier jusqu’à l’avant-dernière étape avant d’être rattrapé par le second lors d’un « Contre la Montre » épique qui est devenu à 22 ans le plus jeune vainqueur du Tour depuis 1904 (qui a été créé un an avant, ndlr) : « coup d’essai, coup de maître » ,ce qui a fait flotter les drapeaux slovènes aussi bien sur les Champs-Elysées que dans les rues de la Capitale du pays, Ljubljana……

Mais sitôt l’épreuve terminée, un autre virus a refait son apparition (mais avait-il vraiment disparu ?), c’est celui du soupçon de dopage qui a d’abord visé les coureurs Colombiens, dont Nairo Quintana et voilà que l’on apprend qu’une autre nation…la Slovénie est connue dans les cercles initiés comme la « championne du monde des contrôles positifs : plus de 42 % de ses coureurs l’ont été l’an passé !

De quoi faire planer « plus qu’un doute » sur nos vainqueurs de cette édition pas comme les autres. « Le Spectre de Pogacar » hante subitement les sentiers douteux empruntés parfois par les cavaliers de la « petite reine », Tintin : fais quelque chose……

 

 

ADIEU MONSIEUR LE PROFESSEUR

(Edito du 22 Octobre)

 

« Adieu, Monsieur le professeur, on ne vous oubliera jamais » chantait Hugues Aufray en 1968. Hier, dans la cour d’honneur de la Sorbonne, cette mélodie poignante était plus que jamais d’actualité.

En effet, une actualité marquée par un drame qui s’est déroulé vendredi dernier, quelques heures avant le couvre-feu : un homme est mort décapité dans la rue, assassiné par un fanatique quelque part dans un pays en guerre probablement : en Afghanistan ? en Libye ? en Irak ?

Vous n’y êtes pas : c’était à Conflans-Sainte-Honorine, Capitale de la batellerie au confluent de la Seine et de l’Oise, au Nord-Ouest de l’Ile de France…la victime s’appelait Samuel Paty, il avait 47 ans et exerçait le métier de Professeur d’Histoire-Géographie dans un collège de la ville…. Au cœur d’un pays qui se croyait à l’abri d'un acte d'une telle barbarie, c’est une véritable onde de choc….

Dans l’enceinte de cette cour d’honneur de la plus prestigieuse université Française, le Président de la République a tenu à saluer la mémoire de ce « héros tranquille », passionné par les livres et surtout animé par la transmission du savoir auprès d’élèves qui avaient le droit de croire ou de ne pas croire, de rappeler avec courage et détermination que l’école se devait d’être laïque et républicaine……

« Monsieur Paty » comme l’appelait ses élèves était un homme apprécié de beaucoup, connu pour son humour, sa curiosité intellectuelle et sa conviction que l’école reste toujours la meilleure voie possible pour se forger un esprit, mieux comprendre le monde et surtout d’éviter de tomber dans l’ignorance qui peut mener à l’obscurantisme qui a toujours tenté de nous gangréner au cours de l’Histoire….

Mais visiblement, cet enseignant qui ne cherchait qu’à faire son travail ne plaisait pas à tout le monde puisqu’une petite minorité aussi agissante que très nocive, celle qui aime attiser les haines à présent « en ligne » a décidé que ce personnage dérangeant, « ce voyou » devait quitter la sphère de l’enseignement, selon les dires d’un activiste islamiste avec la complicité d’un « parent d’élève » outrés par les méthodes éducatives, selon eux, de ce professeur.

Ils ont préféré utiliser les moyens les plus abjects pour arriver à leurs fins en le livrant en « pâture » aux réseaux sociaux, de jouer de la complicité de deux collégiens inconscients qui ont « renseigné » un tueur fanatique de 18 ans qui habitait à 80 kms de là …après avoir été soudoyés pour une somme dérisoire. Ils risquent de le payer très cher....

Une véritable « organisation du crime minutieusement préparée » s’est mise en marche, provoquant ce que le Ministre de l’intérieur a appelé une « Fatwa » et le terme n’est pas exagéré mais qui donne froid dans le dos risquant de facto d’alimenter les peurs qui dans l’inconscient collectif laissent présager que cela puisse arriver n’importe où et à n’importe quel moment, ce que recherche cette « armée des ténèbres », ces « soldats fous » en guerre contre tous ceux qui ne pensent pas comme eux et qu’il faut éliminer avec une violence aveugle….

Une population sidérée et qui demande des « résultats rapides et efficaces » ne va certainement pas faciliter la tâche d’un exécutif qui hérite d’une situation remontant à plusieurs décennies de « non-dits », de « tabous », « d’angélismes », de « coups de menton autoritaires qui restent au stade de l’incantation » ou d’excès d’Islamo-gauchiste avec pour dessein de vouloir « acheter une paix sociale » même si la parole s’est soudainement libérée dans la volonté de ne pas céder à la « peur » sans pour autant embrasser la tentation populiste que certains espèrent….

 Beaucoup d’élus locaux ont su trouver les mots justes lors des cérémonies d’hommages à Samuel Paty : « surtout ne pas stigmatiser une partie de la population qui ne demande qu’à vivre en paix mais adopter une attitude ferme et cohérente et surtout ne pas remplacer cette haine ambiante et sournoise par une autre forme de haine stérile » …. En ces moments difficiles, la tâche est ardue mais pas impossible, d’ailleurs impossible n’est pas Français……

 

 

 

IL ETAIT UNE FOIS DANS L'OUEST

(Edito du 9 Novembre)

 

Il était une fois dans l’Ouest un pays qui avait envoyé des hommes sur la Lune et qui était toujours en pointe dans toutes les technologies avancées mais…qui n’arrivait pas à élire rapidement son Président. C’était une terre de convoitises où le Western en technicolor avait été inventé et où d’ailleurs un grand nombre de ses habitants avaient gardé l’esprit pionnier en continuant à jouer aux Cow-boys et aux Indiens….

Et le reste du monde regardait avec perplexité ce vaste et étrange pays composé de 50 états avec son processus électoral aussi facile à comprendre que les règles du Base-Ball….nous faisons bien sûr allusion aux Etats-Unis d’Amérique et de l’interminable feuilleton au retentissement planétaire commencé le mardi 3 novembre, digne d’un vaudeville avec ses rebondissements aussi incessants  qu’insoutenables et qui s’est finalement achevé vendredi 7 novembre à l’heure du thé provoquant un évident soulagement pour les uns et une colère affichée pour les autres….

Pour faire court, il s’agissait d’élire ou de réélire le Président des Etats-Unis : deux candidats étaient en lice : le sortant Républicain Donald Trump, élu à la surprise générale en 2016 et son adversaire Démocrate Joseph Robinette Biden II, alias Joe Biden… C’est ce dernier qui a été déclaré vainqueur par la plupart des grands médias du pays, mettant fin à ce très long suspense alors que son adversaire a aussitôt refusé de reconnaitre sa défaite et de féliciter son successeur, dénonçant une fraude massive orchestrée par le camp adverse dans quelques états-clés….

Hormis le fait qu’ils soient de la même génération, tout oppose ces deux septuagénaires qui ont chacun leur propre vision de l’Amérique et qui n’auront cessé de s’affronter durant cette longue et rude campagne électorale sur fond de véhémence voire de violence….

L’un, Donald Trump, considéré comme un véritable OVNI politique, avait été programmé depuis l’enfance pour « gagner », véritable showman et homme d’affaires sans états d’âme, alors qu’il avait été perçu il y a quatre ans comme un des cavaliers de l’Apocalypse avait finalement réussi à imprimer sa patte, lui dont le slogan était « Make America Great Again » en parvenant à afficher des résultats économiques indéniables et se targuant d’avoir remis « l’Amérique moribonde » au travail tout en parvenant à prendre un certain leadership vis-à-vis de l’Ogre Chinois dans l’impitoyable guerre économique que se livrent ces deux géants…  

Sa popularité dans « l’Amérique des Champs et des territoires oubliés » n’aura cessé de croître et explique le remarquable score qu’il obtient malgré sa défaite : plus de 71 millions de suffrages en sa faveur, confirmant un socle électoral solide pour son parti d’adoption qui avait fini par être rattrapé par cette doctrine que l’Homme pressé à imposer, à savoir « Le Trumpisme », constituait une valeur sûre pour entamer un deuxième mandat….

Son adversaire, Joe Biden est en revanche un « vétéran » de la politique, celui qui fut le vice-président de Barack Obama durant deux mandats, s’est fait élire sénateur du Delaware dès 1972, à l’époque de Richard Nixon, autrement dit une éternité : clin d’œil de l’histoire : il fut le plus jeune parlementaire élu, il sera désormais le plus vieux président jamais élu ! 

Ce père de famille qui a vécu des drames familiaux (disparition accidentelle de sa première femme et de sa fille, son fils décédé d’un cancer du cerveau) est aussi attaché au Delaware que son adversaire à New York, mais son riche passé parlementaire et de vice-président l’ont amené à être partisan d’un retour au multilatéralisme, à la prise de conscience écologique et au retour d’une meilleure protection sociale, tout le contraire de son adversaire…

L’élu du Delaware avait auparavant essuyé deux revers lors des primaires de 1988 puis en 2008, mais son opiniâtreté a fini par payer en parvenant enfin à être désigné en 2020 pour tenter de déboulonner le locataire de la Maison Blanche. Mais ces débuts de campagne ont été chaotiques, l’homme est également connu pour être aussi habile à faire des gaffes que son adversaire à envoyer des Tweets… Pour certains observateurs : le parfait loser qui voulait faire un baroud d’honneur…

Mais un évènement totalement imprévu s’est invité dans la campagne : un méchant virus qui continue à sévir sur une grande majorité de la planète et qui a provoqué des ravages sur les Etats-Unis : à l’heure actuelle, plus de 230 000 morts et une gestion de la crise sanitaire piteusement menée par le bouillant Mr Trump, qui s’est enfermé dans le déni, minimisant ce qu’il qualifiait être une « grippette chinoise » …

Les cartes ont donc été redistribuées : Joe Biden a pris l’avantage dans le duel électoral tout en jouant les « pères tranquilles de la Nation », se voulant rassurant, en quête de résoudre en priorité la crise sanitaire qui ravage le pays, se présentant toujours masqué devant les foules et faisant campagne tout en respectant le confinement alors que son adversaire paradait dans les rues et les meetings à visage découvert et narguant son « adversaire pleutre » et faisant fi de sa propre contamination….

Joe Biden s’est adjoint les services de Kamala Harris, ancienne procureure de Californie, issue de la diversité et relativement jeune (56 ans) et la mayonnaise a commencé à prendre, plaçant l’outsider en position de favori …jusqu’au jour de l’élection, où chacun sera allé de surprise en surprise : pour la première fois depuis un siècle, le taux de participation a flirté avec les 70 % et un afflux de massifs de votes par correspondance pour cause de COVID…

En France, on pensait que la « Nuit Américaine » ne serait qu’une formalité, certains pronostiquant une « vague bleue » Démocrate… qui s’est cependant transformée en vaguelette pleine d’incertitudes, avec des scores parfois très étriqués dans certains états, contredisant tous les sondages, comme ce fut d’ailleurs le cas en 2016…

 On faillit avoir la « Nuit Polaire » celle qui pouvait durer aussi longtemps qu’en l’an 2000 lors du duel Al Gore-George Bush Jr…. A coups de recomptage, de bulletins arrivés en retard, de coups de théâtre jusqu’à la chute finale… de quoi nous faire rire, nous qui connaissons notre vainqueur à la Présidentielle à 20 heures….

L’annonce de la victoire de Biden a provoqué des scènes de joie et de soulagement dans un camp Démocrate qui a également réjoui les chancelleries du monde entier, à l’exception de la Chine et de la Russie et certainement du Brésil… Dans le camp Républicain, on a vu en revanche des manifestations de protestations, le lancement d’un arsenal législatif pour remettre en cause ce résultat jugé injuste et truqué et un Président sortant qui, entre deux parties de golf ne veut surtout pas « lâcher l’affaire » … même si quelques-uns de ses partisans n’ont pas tardé à féliciter le vainqueur….

Joe Biden ne prendra donc ses fonctions que le 20 janvier lorsqu’il prêtera serment, en présence ou non de Donald Trump.  Ce dernier continuera à siéger dans le bureau Ovale et s'ingéniera à saper la passation de pouvoir ou pas, l’avenir nous le dira tant l’homme est imprévisible. C’est une tâche titanesque qui attend le « vieux sage » Biden, en quête de sortir son pays du « fléau viral » et surtout de réconcilier les deux Amériques qui se sont affrontées, conscient que son vieil ennemi « le vieux lion au crin gominé » n’est pas mort ce soir, il ne nous reste plus qu’à lui souhaiter « Good Luck, In Joe they trust » …

 

 

  

LES ENFANTS DU PARADIS

(Edito du 23 décembre)

 

 

Décidément, cette maudite année 2020 ne nous aura rien épargné : la mort vient juste de faucher Claude Espinasse dit Brasseur à l’âge de 84 ans mais pas des suites du Covid comme on pouvait le présumer. Non l’enfant de la balle, issu d’une dynastie de comédiens s’en est allé paisiblement, prompt à rejoindre au Paradis quelques-uns de ses copains partis avant lui pour lui chauffer la place…

Finalement, une carrière riche de plus de 110 films, de nombreuses pièces de théâtre à succès et de rôles mémorables à la télévision qui constituent indéniablement un joli bilan, voire une véritable œuvre pour cet homme pudique et modeste qui se considérait plus comme un « artisan » que comme une « star » un mot qui ne voulait pas dire grand-chose pour lui…

Salué de façon unanime comme un des « derniers géants » de la profession, Claude Brasseur aura marqué à sa façon toutes les générations : Fils de Jean Gabin dans « Rue des Prairies » certainement pour faire oublier d’être le « Fils de » Pierre Brasseur, acteur considérable et pour commencer à se faire un « prénom »,  puis de participer à l’aventure de la « Nouvelle vague » avec le Godard de « Bande à part », il était  parvenu à se faire un « nom tout court » avec « Vidocq » (1970) de Marcel Bluwal avec lequel il fut également un étonnant Sganarelle dans son mémorable « Dom Juan » avec Michel Piccoli en 1965.

Les générations suivantes l’assimileront bien sûr au père de Sophie Marceau dans la « Boum », succès phénoménal des années 80 ou à Jacky Pic, le patriarche de « Camping » …qui fit également les grandes heures du box-office au firmament de sa carrière…

Il savait tout jouer, il pouvait surtout tout jouer, capable de donner dans le registre dramatique comme « la guerre des polices », « la Crime » ou « l’orchestre rouge » que dans les comédies devenues cultes comme bien sûr les deux opus d’Yves Robert : « Un Eléphant, ça trompe énormément » et « nous irons tous au Paradis » ce dernier nommé car les quatre protagonistes du film : Rochefort, Lanoux, Bedos et à présent Claude Brasseur » vont désormais pouvoir continuer à déconner de façon éternelle sous le regard complice de Saint Pierre….

Un acteur solide et perfectionniste qui continua longtemps à prendre des cours de comédie, jubilant toujours à accomplir de métier avec une grande noblesse en sachant pertinemment la rudesse et les aléas qu’il comportait…

Lui-même, fils de Pierre Brasseur et d’Odette Joyeux, il souffrit de l’absence de ses parents rapidement séparés et d’un probable manque d’affection de ces derniers trop occupés par leurs carrières respectives, l’amenant à fréquenter les pensionnats où il put avoir comme condisciples Jean Jacques Debout et…Jacques Mesrine. Il hésita dans un premier temps à reprendre le « flambeau familial », sorte de cadeau empoisonné selon lui : après des études chaotiques, il tenta d’embrasser la carrière journalistique mais la grande Elvire Popesco l’incita rejoindre le chemin des planches…il prit des cours au conservatoire où il put côtoyer la « bande à Bebel » qui deviendront des copains pour la vie….

Des planches qu’il brula donc, non sans brio, il connut la gloire avec le fameux « Diner de cons » de Francis Veber en compagnie de l’ami Villeret ou bien sûr « le souper » de Jean-Claude Brisville, en compagnie de Claude Rich….

On aura compris, il y avait plusieurs Claude Brasseur : outre l’acteur, on connut également le sportif, le fan de cyclisme, le membre de l’équipe de France de Bobsleigh ou encore le copilote de Jacky Ickx lors du « Paris-Dakar » qu’ils remportèrent dans les dunes du désert…

Il y eut aussi le « Claude Brasseur » infatigable oiseau de nuit, avec ses camarades de « picole » des nuits Parisiennes de chez Castel notamment où l’on jouait les prolongations jusqu’à l’aube, et où il fallait savoir se « tenir » au comptoir, comme lui avait probablement appris son affectueux parrain, Ernest Hemingway, le prix Nobel qui savait lever le coude…et l’emmener voir des corridas en Espagne…Olé…

Mais il restera surtout le Claude Brasseur que nous avons l’impression d’avoir toujours connu, qui s’est souvent invité à nos soirées sur les planches, sur l’écran noir de nos nuits blanches ou qui apparaissait à l’heure de la « dramatique » sur l’étrange lucarne…

Un fils « de » devenu une « valeur sûre » puis un « père de » son fils Alexandre qui a choisi de perpétuer la tradition familiale…. Le spectacle continue et un zeste de nostalgie nous envahit quelque peu, tout en saluant une ultime fois cet « éléphant qui ne se trompait jamais » et qui est parti rejoindre au paradis ses camarades de chambrée…. Avant la « mise en bière » de Monsieur Brasseur au Père-Lachaise, levons une dernière fois notre verre pour saluer le bonhomme….