LE ROMAN DE BERNARD (Edito du 7 Octobre).
Il est mort un dimanche de pluie à l’âge de 78 ans , des suites d’une longue maladie mais d’une façon paisible et entouré des siens. L’annonce de sa disparition (certes prévisible du fait du mal qui le rongeait) a suscité une vive émotion autant parmi ses amis (nombreux) que chez ses détracteurs (tout aussi nombreux). Il faut dire que Bernard Tapie n’aura jamais laissé personne indifférent de son vivant….
Bien avant l’invention des réseaux sociaux, l’homme aura fait le « Buzz » et su se forger une réputation voire une légende qui aura alimenté l’espace médiatique pendant plus de quatre décennies….
Une vie bien remplie… Non en fait , de multiples vies bien remplies, avec des « hauts » et des « bas » comme on aime à le rappeler . Un personnage « haut en couleur » dont on a fini par se persuader qu’il savait tout faire : homme d’affaires, président de club de foot et d’équipe de cyclisme, homme politique, animateur de télévision, comédien, chanteur, etc, etc….
C’est l’histoire d’un gosse né sous l’Occupation, issu d’une famille ouvrière originaire de l’Ariège ayant émigré dans la banlieue Nord-Est de Paris (actuel 9-3) et qui passera une jeunesse chiche mais heureuse dans la France des « Trente Glorieuses » avec des rêves de réussite plein la tête….
Un gamin gouailleur qui n’usera pas trop longtemps ses fonds de culotte sur les bancs de l’école (même s’il bidonnera par la suite son cursus scolaire, mais tout le monde sait que son université fut « celle de la vie », facilitée par ses dons innés pour la « Tchatche », le « culot » et surtout « la culture de la gagne » qui constituera son ADN…
Généralement, ceux qui sont programmés pour « réussir » passe par la case « grandes écoles » : HEC, Polytechnique ou encore l’ENA, lui, le futur « Nanard » sera au contraire l’incarnation du « Self Made Man » avec comme credo majeur « l’argent est le nerf de la guerre »….
Il se cherche un peu dans les années 60, envisageant même d’être un «artiste », commentant plusieurs 45 tours sous le pseudo de Bernard Tapy mais le succès ne sera pas au rendez-vous ou loupant certaines opportunités comme lorsque son ami Claude Lelouch lui proposera un rôle dans son film « l’aventure, c’est l’aventure » mais ça ne sera que partie remise, comme chacun sait…
Le beau gosse du Bourget prend son envol différemment en se découvrant des « aptitudes » pour la vente, il devient vendeur de téléviseurs à domicile à une époque où encore une grande partie des foyers n’en sont pas équipés, adore tirer les sonnettes et arpenter le bitume car son pouvoir de conviction fait merveille….
Sa fibre entrepreneuriale apparait dès le début des années 70 mais le succès n’est pas encore au rendez-vous, il faudra attendre la fin de la décennie et celle des années Giscard pour voir « décoller » Bernard Tapie qui se découvre une vocation de « repreneur d’entreprises en difficultés » et quelques coups d’éclat : la reprise de « Manufrance », ancien fleuron de la VPC Stéphanoise, de l’entourloupe du château Yvelinois de Bokassa, etc….
Il devient donc le « Messie » des entreprises qui périclitent, les rachetant souvent pour un franc symbolique pour finalement s’en débarrasser très rapidement, tout en faisant une belle plus-value au passage mais avec une nouvelle réputation : « le Messie » se transforme en « Attila » : partout où il passe : les « friches industrielles » ne repoussent plus….
Les années 80 seront celles de son « apogée » dans une France qui s’est mis à « voter à gauche » mais qui est paradoxalement celle des « années fric » et des paillettes : celui qui fut également un éphémère pilote de Formule 3 continue à bâtir son « Empire », intègre le « club fermé des milliardaires » savourant en une génération d’être passé du 20 M2 à l’hôtel particulier : ce «Rastignac » des temps modernes a un appétit insatiable : il entreprend à tout-va : dans le sport, où il relance la carrière de Bernard Hinault (jusqu’à ce jour le dernier vainqueur Français du Tour de France !) avec la « Vie Claire » puis bien sûr la reprise (toujours pour 1 Franc symbolique) de l’OM alors moribond qu’il propulsera au sommet de l’Europe (encore une fois, le seul club Français à avoir remporté une coupe d’Europe) : un « Winner », qui fréquente aussi les « plateaux télés » en devenant animateur sur TF1, devenant un « modèle de réussite sociale » pour certains qui voient en ce « prolo sorti des bas-fonds » comme le surnommera cruellement son meilleur ennemi Jean-Marie Le Pen : la démonstration que l’on peut réussir sans sortir de l’establishment.
Un establishment qui toutefois ne l’admet pas vraiment, voyant souvent en lui un hâbleur, monteur de « coups » tout en reconnaissant son énergie et surtout sa « niaque » qui constituera indéniablement sa force de frappe dans les bons comme dans les mauvais jours et ce, jusqu’à son dernier souffle….
La politique le rattrape, il rejoint les radicaux de gauche, est fasciné par Mitterrand qui en fera un éphémère « ministre de la Ville » (comme son vieux copain avocat: Jean-Louis Borloo) avant d’être rattrapé par le scandale du « match truqué OM-Valenciennes » qui finira par l’envoyer en prison : il retrouve les espaces exigus (9 M2) mais à la prison de la Santé…
On connait la suite, l’homme s’en remettra, flirtant toujours avec le pouvoir (cette fois ci avec Nicolas Sarkozy) connaissant a posteriori d’autres démêlés avec la justice, dont celui avec l’affaire du « Crédit Lyonnais » feuilleton à rebondissements multiples dont il sortira alternativement vainqueur puis en grande difficulté jusqu’à ses derniers jours, harcelé par l’appareil judiciaire, insensible à la maladie qui le rongeait et qui a fini par le vaincre un dimanche de pluie, éteignant de facto la procédure à son endroit (mais pas pour ses compagnons d’infortune)…
Sa vie ici brièvement résumée fut un véritable « roman », celle d’un personnage indéniablement « hors du commun », souvent plus complexe que l’on croit, un homme charismatique aux « mille vies » comme cela a été évoqué, souvent contesté, aux méthodes non moins contestables mais qui savait faire le « show ».
Mais la page « FIN » de son « roman » est tournée, l’ex-« navigateur du Phocéa » a décidé d’être inhumé à Marseille, lui l’homme pressé qui parlait « pointu » mais qui a su s’y faire adopter avec ferveur, réussissant un atterrissage définitif sur la terre de Provence, bien loin du Bourget, où il avait pris son envol, dans une autre (nombreuse) vie….
AMI, ENTENDRAS-TU ENCORE LE VOL NOIR DES CORBEAUX SUR LA PLAINE ? (Edito du 13 Octobre)
Hubert Germain, jusqu’à présent ultime survivant des 1038 Compagnons de la Libération s’est donc éteint à l’âge de 101 ans. C’est Florence Parly, ministre de la Défense qui a annoncé sa disparition suscitant une certaine émotion dans l’opinion publique, consciente qu’une page de notre histoire était en train de se tourner lentement mais sûrement : celle de la glorieuse épopée des acteurs actifs d’un deuxième conflit mondial qui ébranla le monde entre 1939 et 1945…
Mais n’oublions pas que fermer un livre n’est pas synonyme de de le voir rangé définitivement dans une bibliothèque poussiéreuse : bien au contraire, notre devoir de mémoire doit demeurer intact car l’histoire a tendance à bégayer parfois…
Hubert Germain n’était pas forcément connu du grand public, comme bon nombre des Compagnons de la Libération que l’histoire aura qualifié de « héros de l’ombre » qui aimaient à dire qu’ils n’avaient fait que leur devoir mais sa situation « singulière » de dernier Compagnon, avec le privilège d’être inhumé dans la Crypte du Mont-Valérien lui aura donné une notoriété évidente, notamment lors du 80ème anniversaire de l’Appel du 18 juin quand les honneurs lui furent rendus….
On se souvient de lui, devenu pensionnaire de l’Ordre de la Libération , calé dans son fauteuil roulant, l’œil malicieux, avec son béret vissé sur la tête et dialoguant avec le Président de la République….
Cet ultime témoin d’une époque qui s’est agrégée à la Grande Histoire n’était pas peu fier d’appartenir à cette unique confrérie inspirée de la « Chevalerie » qu’instaura le Général de Gaulle, une sorte de noblesse d’épée et composée d’hommes et de femmes (malheureusement sous-représentées : elles ne furent que six) désintéressés mais qui avaient en commun de ne pas s’être « résignés » à subir l’humiliante défaite de 1940, préférant plutôt « continuer » le combat, persuadés comme leur inspirateur que la « France avait perdu une bataille mais pas la guerre »..
Beaucoup d’entre eux à l’instar d’Hubert Germain était jeune (voire très jeune, le plus jeune Compagnon périt à moins de 15 ans) lorsqu’ils rejoignirent « l’armée des Ombres », ce qui peut expliquer leur fougue et leur détermination (leur inconscience, pourra dire alors une majorité plus abasourdie que silencieuse).
Ces « 1038 » venaient pourtant d’horizons bien différents pour ne pas dire opposés : on y trouvait des royalistes, des socialistes, des communistes, des écrivains (tel Malraux, Romain Gary ou Joseph Kessel et Maurice Druon, ces deux derniers à qui l’on doit « Le chant des Partisans), des Religieux (comme Thierry d’Argenlieu, également officier de marine et qui fut le premier des « compagnons de la libération »), beaucoup de militaires (haut gradés comme simples hommes de troupe), des futurs ministres et chefs de gouvernement de la Vème République (Chaban-Delmas, Messmer, Galley, Savary, etc…), des prix Nobel (Cassin ou Jacob), etc…. Sans oublier des hommes d’état étrangers : Churchill, Eisenhower ou encore Mohamed V, roi du Maroc….
Cinq localités dont celle de l’Ile de Sein qui fut la première à répondre à l’Appel du 18 juin…Les trois-quarts des Compagnons eux appartinrent à la « France Libre » tandis que le dernier quart composa l’indispensable « Résistance intérieure »….
Hubert Germain était le fils un peu dilettante d’un Général alors favorable au Maréchal Pétain et qui ne comprit pas la curieuse décision de son fils de se rallier à un général à titre provisoire, déserteur de surcroit alors que le combat était perdu selon lui aggravé par le risque d’anéantir un « avenir prometteur » : celui d’officier de Marine.
L’aspirant-marin choisit en effet de rendre une « copie blanche » au concours d’entrée à l’Ecole Navale, donnant comme motif que « son combat était ailleurs » qu’entre ces murs.
A 20 ans, il prenait donc son destin en main : il parvint à rejoindre l’Angleterre, en embarquant à Saint-Jean de Luz puis poursuivit sa préparation militaire d’officier au sein de l’armée de la France Libre.
Il appartiendra désormais à cette France Combattante qui s’illustra lors de la Campagne de Syrie, servit sous les ordres du Général Koenig puis rejoindra la Légion pour combattre dans les « sables du Désert » notamment à Bir Hakeim, un des épisodes les plus héroïques d’une armée française exilée qui sut tenir tête au redoutable « Rat du Désert », le Maréchal Rommel ainsi qu’à El Alamein pour se prolonger durant la Campagne d’Italie et le débarquement en Provence, où il déplora d’ailleurs la « relative passivité » des autochtones alors que l’espoir de la libération du Pays s’ouvrait à eux…
L’après-guerre sera pour ce Compagnon (et pour tous ceux qui avait appartenu à la Résistance) sera souvent synonyme de « réussite sociale » dans une France en reconstruction : il intégra l’industrie puis les cabinets ministériels, dont celui de son compagnon d’armes : Pierre Messmer et dont il deviendra le Ministre des PTT puis des Relations avec Parlement, lors de son passage à l’Hôtel Matignon entre 1972et 1974.
Il embrassera d’ailleurs une carrière politique, en étant Député Gaulliste de Paris mais également Maire de Saint-Chéron (Seine et Oise, auj. Essonne) entre 1953 et 1965. A noter que cette coquette bourgade du Hurepoix peut s’enorgueillir d’avoir ultérieurement élu un autre maire issu de la « France Libre », l’Amiral de Cazanove….
Hubert Germain n’oublia jamais cet esprit de « Compagnonnage » et de « fibre Gaulliste » en témoignent les clubs politiques ou autre loge maçonnique qu’il fréquenta (il créa même la « loge Pierre Brossolette », un autre célèbre Compagnon) et terminera sa carrière dans l’industrie….
Ainsi devenu Pensionnaire de l’Institution Nationale des Invalides, le vénérable centenaire a vu partir avant lui l’avant-dernier Compagnon : Daniel Cordier. Ce dernier, ancien secrétaire de Jean Moulin, confiait non sans humour qu’il n’aurait pas voulu de toute façon être inhumé dans la crypte du Mont-Valérien, car il doit y faire froid……
Lui, Hubert Germain ne dit pas non à cet honneur, fier d’être un « soldat connu » contrairement à celui de l’Arc de Triomphe » et savourera post-mortem les différents hommages qui lui seront rendus dans les jours et mois qui suivront…
Une page se referme donc mais comme l’a souligné Hubert Germain : avec sa disparition, la flamme va certainement s’éteindre, mais les braises survivront…Au-delà de cette jolie métaphore, on peut désormais entretenir ce devoir de mémoire et mieux comprendre les raisons du combat de tous ces « héros de l’ombre » qui réveillent nos consciences parfois engourdies….
MON ROYAUME POUR UN SONDAGE (Edito du 26 Octobre)
Nous sommes en 1938, Jean Stœtzel, un ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure, bien que fraichement reçu au concours de l’Agrégation de Philosophie cherche toujours sa voie : il va enfin la trouver en effectuant un stage Outre-Atlantique à la prestigieuse Université de Columbia et découvrir les travaux de George Gallup, cet ancien journaliste devenu Statisticien que l’on surnomme alors « le roi des Sondages »….
Le jeune Français de 28 ans est de facto convaincu qu’il est important d’exporter sur le vieux Continent cette méthode d’investigation d’une rigueur scientifique établie et qui permet de pouvoir tester à un instant donné l’état de l’opinion .
C’est alors qu’il rentre en France et crée au mois de Novembre de la même année : l’Institut Français d’Opinion Publique (IFOP), à un moment où notre pays et ses voisins vivent une période très trouble symbolisée par les « récents Accords de Munich » dit « ceux de la dernière chance » : quand l’Angleterre et la France pensèrent ( ?) avoir conclu un « accord a minima » pour sauver la paix face à une Allemagne plus menaçante que jamais (épaulée par son allié Italien) en acceptant de sacrifier la Tchécoslovaquie aux volontés hégémoniques du « Führer » dont ils étaient pourtant venus plaider la cause en plus de vouloir éviter un deuxième conflit mondial….
Un premier sondage avait été réalisé par les équipes de Stœtzel peu avant les négociations et dont les questions portaient plutôt sur la politique intérieure, notamment économique menée par le Gouvernement du Front Populaire et qui montra que les « sondés » désiraient un changement de cap en profondeur , tandis que quinze jours plus tard, dans un second sondage plus tourné sur l’International, les « même sondés » plus fatalistes que jamais sur l’imminence de la guerre, plaçaient à présent les priorités sur un gros « effort » à opérer en matière d’armement….
C’est sous la Vème République que les sondages connurent leur apogée et leur réputation de « fiabilité »… notamment à partir de 1965, année de la première élection du Président de la République au suffrage universel et où apparut également en France, le concept de « Marketing Politique » importé une fois de plus des USA et lancé par le publicitaire Michel Bongrand chargé de la campagne de son « poulain » : le centriste Jean Lecanuet qui brouilla le duel attendu De Gaulle-Mitterrand en provoquant un « ballotage » inattendu pour le « sortant »…
Pourtant, les sondages avaient prédit ce ballotage mais au résultat plus serré, étant aidés par un instrument de mesure connexe des intentions de vote que constituaient alors les Renseignements Généraux…
Ce support nouveau et en pleine expansion qu’était en train de devenir la Télévision changea également beaucoup la donne, permettant pour la première fois à l’opinion de découvrir non seulement le visage de l’opposition mais son expression, jusqu’alors bridés par une télévision quelque peu garrotée par le pouvoir mais permettant également l'avènement des « petits candidats » souvent marginaux qui pouvaient alors connaitre de façon espérer : leur « quart d’heure de célébrité » durant les campagnes qui suivirent… et de pouvoir ainsi « grapiller » quelques miettes de pourcentage dans les sondages….
Mais la relative « fiabilité » des sondages, exempts alors de grosses surprises était également facilitée par le scrutin majoritaire permettant de dégager des « majorités » claires et indiscutables (sauf pour les amateurs de proportionnelle le jugeant inique car ne reflétant pas la réalité des suffrages exprimés) et surtout une vie politique bipolaire : d’un côté la Droite et de l’autre la Gauche….
A partir de cette élection et dans toutes celles qui suivirent, les instituts de sondages se développèrent, outre l’IFOP, la Sofres, créée en 1963 par Pierre Weill (à l’origine Journaliste, mais à ne pas confondre avec son homonyme connu sur les ondes de France Inter) et longtemps incarné par Jérôme Jaffré, puis plus tard, l’Ipsos avec le truculent Jean-Marc Lech ou l'institut Louis-Harris avec Roland Cayrol sans oublier ses autres éminents collègues: Pascal Perrineau ou encore Olivier Duhamel (avant sa disgrâce) jusqu’à aujourd’hui avec Jérôme Fourquet, Frédéric Dabi, Brice Teinturier ou encore Gael Sliman , etc…
Les « Politologues » devinrent alors les « Guest stars » des soirées électorales où ils décortiquaient avec précision les résultats, en adéquation parfaite avec leurs propres études effectuées antérieurement à la campagne.
Mais déjà certaines critiques fusèrent sur les fameuses « marges d’erreur » qui pouvaient contrarier finalement les résultats escomptés par les vaincus du jour tandis que les vainqueurs souriaient sous cape de ces erreurs d’appréciation (en fait souvent dues aux imprécisions ou pieux mensonges des « sondés » eux-mêmes). D’autres contestèrent la « teneur » scientifique desdits sondages ou leur incitation sous-jacente à poser des questions orientées à une opinion publique gavée de surinformation qui permet difficilement d’ajuster son ressenti…
Electeur lambda ou candidat politique, la plupart sont devenus en grande partie accros aux sondages, à l’instar d’un Valéry Giscard d’Estaing qui s’adjoint très vite les services de Michel Pinton, un « spécialiste des sondages » qui avait fait ses premières armes dans le staff de Bobby Kennedy (en 1968), ses successeurs de Mitterrand (qui préférait également consulté l’astrologue et ex-miss France Elisabeth Tessier), de Chirac (également friand des confidences de ses «conquêtes » journalistiques, inspirant quelques années après François Hollande) sans oublier Nicolas Sarkozy, qui comme on le voit encore de nos jours, consommait sans modération de véritable « plâtrées » de sondages…..
Mais on le sait, la belle mécanique bien huilée des sondages s’est grippée à partir de 1995, on se souvient d’Edouard Balladur, que certains sondeurs voyaient élu dès le premier tour, surtout face à un Chirac jugé « fini » autant d’ailleurs qu’en 2002 où l’incontournable Lionel Jospin devait lui donner le coup de grâce que ce dernier reçut à sa place mais de la part de Jean-Marie Le Pen que les sondeurs n’avaient pas vraiment vu venir….
On se rappelle toujours la disgrâce d’un futur candidat « socialiste » boosté par de prometteuses intentions de vote qui fondirent comme neige au soleil dans la chambre d’un hôtel New Yorkais ou plus récemment du vainqueur d’une primaire de la Droite qui avait terrassé son adversaire d'abord favori et était convaincu alors de devenir de facto le futur locataire de l’Elysée mais qui s’effondra comme un château de cartes soufflé par un fatal courant d’air politico-judiciaire….
Les sondeurs ont donc dû admettre que le «hasard » et les cas de force majeure pouvaient devenir le « matin » des outsiders, ceux qui à l’origine n’était pas inclus dans la spirale de la victoire potentielle, à l’instar des deux derniers présidents élus et pourtant….
On sait que de nouveau paramètres ont dû être pris en compte : la poussée de l’absentéisme surtout dans les tranches d’âge les plus jeunes, l’émergence d’une troisième force située à la droite de la droite de l’échiquier politique, l’effondrement du Parti Communiste , l’implantation durable d’une gauche radicalisée (quatrième force potentielle) ou l’émergence du vote écologique qui troublent le jeu à gauche tout comme à droite, où certains électeurs ne savent plus toujours où ils habitent…Après le « dégagisme de 2017 » qui a vu se brouiller le clivage droite-gauche, il est clair que tout cela constitue un véritable casse-tête pour le sondeur.
Mais jusqu’alors, les fondamentaux de cette « fiabilité » des sondages résidaient dans la lecture d’un premier tour (de piste) qui donnait dès lors la clé du deuxième tour : la quasi-certitude du vainqueur de l’élection sans véritable surprise….
En 2022, un nouveau concept a vu le jour, très largement entretenu par les médias et les sondeurs : l’annonce présumée d’un second tour, entre deux candidats qui ne sont toujours pas déclarés ! . Un duel entre un célèbre Journaliste (devenu Idéologue bankable) qui depuis son interdiction d’antenne par le CSA est devenu paradoxalement omniprésent sur les chaînes en continu et un Président sortant, que certains accusent de profiter de sa fonction (mais c’est souvent le cas pour les sortants) pour faire allègrement campagne….
Quid du premier tour ? : les sondages ont d’emblée enterré une gauche tellement divisée que cela leur donne raison, d’une droite qui feint de croire à ses chances de reconquête sans un chef naturel, sans oublier un Rassemblement national que l’on dit menacé par son « cousin » promis au second tour et surtout à siphonner un grand nombre de ses électeurs comme ceux d’une frange la plus conservatrice de la droite….
A l’orée 2022, les commentaires vont bon train et l’intérêt pour la chose politique reste vivace même si les électeurs boudent de plus en plus l’isoloir et contrarient toujours plus les pronostics mais pas les impressions : les candidats « portés » par des sondages prometteurs se sentent «investis » d’une mission, ayant compris le message envoyés par leurs supporters tandis que les « artistes incompris ou jugés inaudibles » balayent d’un revers de main ces « sondages qui ne font pas l’élection » : il y a un peu de vrai dans tout cela et comme disait jadis le truculent Alexandre Sanguinetti : « Les sondages ne votent pas, ce sont les gens qui votent »